Trois jours, c’est le temps qu’aura mis l’étape ouest-africaine de l’« Arctic Sunrise », le navire brise-glace de l’ONG Greenpeace, en expédition du pôle Nord au pôle Sud pour sensibiliser à la protection des océans. Du 12 au 14 septembre 2019 au Sénégal, Greenpeace a présenté un rapport concernant les dégâts environnementaux et écologiques causés par les usines de farine de poissons en Afrique de l’Ouest. Selon le rapport intitulé « Poisson détourné », ces usines dans lesquelles des tonnes de poissons, déviées de la consommation humaine, sont broyées et transformées en poudre sont au nombre d’une cinquantaine. Elles sont notamment localisées au Sénégal, en Gambie, et surtout en Mauritanie (33 usines).
Dans ces établissements souvent très souvent rudimentaires et à la main-d’œuvre extrêmement réduite (4 personnes en moyenne), les experts de Greenpeace notent des dégagements toxiques, en particulier d’ammoniaque, issue de la fermentation des poissons.
Outre cette pollution à l’ammoniaque, la surpêche occasionnée par ces usines menace la survie des sardines au large des côtes ouest-africaines. Ce petit pélagique, facilement transformable en farine, est en effet très prisé par ces usines. Et les piroguiers préfèrent vendre ces sardines aux usines plus tôt qu’aux ménagères qui proposent des prix plus bas. Dès lors, la surpêche menace avec ses conséquences préjudiciables à l’écosystème marine. Car 4 à 5 kilogrammes de sardines fraiches sont nécessaires à la production de seulement 1 kilogramme de farine de poisson.
La solution : fermer les usines de farine de poisson
Vu l’allure à laquelle la situation se détériore sur le terrain, le gouvernement gambien a pris une mesure restrictive. Il a suspendu l’octroi des licences d’exploitation d’usine de farine de poisson.
Cependant, l’ONG Greenpeace pense qu’il faut désormais aller plus loin, en arrêtant le fonctionnement de ces usines. « L’histoire a montré qu’à un moment, en Europe du Nord, ces usines ont toutes plié bagage parce que les entreprises avaient nettoyé tout le stock. Donc c’est la même histoire qui est en train de se répéter ici. Quand les stocks vont s’épuiser, ils vont partir s’installer ailleurs », a déclaré à RFI, le docteur Ibrahima Cissé, responsable de la campagne « Océans » pour Greenpeace Afrique.
Rappelons que l’initiative de Greenpeace en Afrique de l’Ouest s’inscrit dans le cadre de la plus grande expédition de son histoire, lancée en avril 2019. Son bateau, l’Esperanza, est parti de Londres pour effectuer un voyage d’exploration qui durera près d’un an, reliant le pôle Nord au pôle Sud. L’objectif de cette mission est de mettre en lumière les nombreuses menaces qui pèsent sur les océans, et d’appeler à l’adoption d’un traité international ambitieux permettant la création d’un réseau de réserves marines en haute mer, seul outil efficace pour protéger les océans.
Boris Ngounou