L’ONG GroundWork et le média communautaire Vukani ont porté plainte contre le gouvernement sud-africain, pour avoir failli au droit constitutionnel à un environnement sain, dans le nord-est du pays. Dans cette région, qui concentre 83 % de la production de charbon de l’Afrique du Sud, des niveaux élevés de pollution de l’air ont causé entre 305 et 650 décès prématurés en 2016.
Le gouvernement sud-africain devra se présenter devant un tribunal, afin de répondre aux chefs d’accusations qui pèsent contre lui, notamment celui de « violation du droit constitutionnel à un environnement sain pour les populations ». Dans cette nouvelle affaire qui va certainement cristalliser les attentions des écologistes, la partie plaignante est constituée de deux organisations non gouvernementales, GroundWork, d’Afrique australe, et Vukani, basé en Afrique du Sud. Les deux ONG environnementales accusent les autorités publiques d’avoir échoué à réduire les niveaux mortels de pollution de l’air dans la région du Highveld, située dans la province du Mpumalanga, au nord-est du pays.
Greenpeace, dans son rapport paru en fin 2018, a présenté la province de Mpumalanga (qui regroupe à elle seule près de 83 % de la production nationale de charbon), comme étant la région qui possède le groupe de centrales électriques au charbon le plus polluant du monde, produisant des niveaux records de dioxyde d’azote. Ici, les populations sont exposées au quotidien à des produits toxiques émis par les usines. Il s’agit de dioxyde de soufre, de métaux lourds comme le mercure, et de particules fines, qui provoquent des maladies chroniques telles que l’asthme, les bronchites, et des cancers du poumon. Ces substances peuvent également contribuer à des accidents vasculaires cérébraux ainsi qu’à des naissances prématurées.
Le gouvernement est tenu pour principal responsable, car il possède 12 des 15 centrales présentes dans la région. Et, selon une enquête indépendante, citée par les deux ONG, ces 12 sites plus une raffinerie de pétrole et une centrale de liquéfaction du charbon ont été responsables de l’essentiel de la pollution atmosphérique dans la région, en 2016. L’année où elles avaient causé les décès prématurés de 305 à 650 personnes.
Le gouvernement passe aux aveux
Réagissant à l’annonce de la plainte déposée le 10 juin 2019 par GroundWork et Vukani, la nouvelle ministre de l’Environnement, Barbara Creecy, a reconnu qu’il y avait des problèmes de qualité de l’air dans le Highveld. En revanche, elle s’est prononcée pour des discussions en dehors des tribunaux pour les résoudre.
Il faut cependant noter que malgré la bonne foi de la ministre de l’Environnement, satisfaire les attentes en matière de qualité d’air dans le Highveld ne sera pas chose aisée. L’Afrique du Sud, première puissance industrielle d’Afrique ne tournera pas le dos de sitôt au charbon, qui constitue jusqu’ici 88,7 % de sa production d’énergie. En dépit du succès impressionnant de la stratégie en faveur des producteurs d’électricité indépendants (IPP) dans le domaine des énergies renouvelables.
En attendant de produire suffisamment d’énergies renouvelables, pour offrir une alternative au charbon, l’État sud-africain s’est doté d’une taxe carbone. Dans un premier temps, cette taxe entrera en vigueur du 1er juin au mois de décembre 2022, au prix de 120 rands (7,3 euros) par tonne de CO2 émis — un montant qui sera réévalué chaque année en fonction de l’inflation. Mais cette taxe ne concernera que les entreprises et devrait couvrir jusqu’à 80 % des émissions du pays, selon la banque mondiale. Des exonérations sont prévues, elles pourront atteindre 6 à 48 rands la tonne de CO2.
L’objectif premier de la taxe carbone est de réduire les émissions de gaz à effet de serre d’une façon viable. Elle va inciter les entreprises et les consommateurs à aller vers des modes de production et de consommations bas-carbone en renchérissant le coût de ceux qui polluent.
Boris Ngounou