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AFRIQUE : LA RÉUTILISATION DES EAUX USÉES TRAITÉES EN EAU POTABLE

Dossier-Reuse-Veolia-Afrik21
  1. Le stress hydrique : c’est quoi ?
  2. L’Afrique est-elle touchée par la pénurie d’eau potable ?
  3. Le réchauffement climatique aggrave-t-il la situation ?
  4. Au fait, l’eau potable c’est quoi ?
  5. Quelles sont les conséquences de la pénurie d’eau ?
  6. Pourquoi le Maroc, comme d’autres pays, mise-t-il désormais sur les eaux « non conventionnelles » ?
  7. ReUse : comment réutiliser les eaux usées traitées ?
  8. Quels sont les avantages économiques de la réutilisation des eaux usées traitées pour l’eau potable ?
  9. Quels sont les avantages environnementaux de la réutilisation des eaux usées traitées en eau potable ?
  10. Quels pays dans le monde recyclent les eaux usées traitées en eau potable ?
  11. Pourquoi Windhoek, la capitale de la Namibie a-t-elle choisi de rendre potables les eaux usées ?
  12. Recycler les eaux usées en eau potable, à Windhoek, comment ça marche ?
  13. Quelles précautions sont prises pour la santé humaine à Windhoek ?
  14. Quelle différence entre la réutilisation directe ou indirecte des eaux usées ?
  15. Peut-on reproduire l’exemple de Windhoek ? À quelles conditions ?
  16. La réutilisation des eaux usées, une solution d’avenir pour l’Afrique ?
  17. Pourquoi l’Afrique pourrait devenir pionnière en matière de réutilisation des eaux usées ?

 

1. Le stress hydrique : c’est quoi ?

Le stress hydrique désigne les périodes durant lesquelles la demande est supérieure à la quantité d’eau potable disponible. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) parle de stress hydrique dès lors que la disponibilité en eau, par an et par habitant, est inférieure à 1 700 m3. Selon les Nations Unies, environ 3 milliards de personnes devraient être confrontées à un stress hydrique d’ici 2025.

2. L’Afrique est-elle touchée par la pénurie d’eau potable ?

Afrique est concernée, comme d’autres continents. Les États-Unis par exemple sont en état de stress hydrique chronique, et le sud de l’Australie souffre gravement de pénurie d’eau. Par ailleurs, l’ONU indique que la demande d’eau douce devrait croître de 40 % d’ici 2050 et qu’au moins une personne sur quatre vivra dans un pays où le manque d’eau douce sera chronique ou récurrent.

L’explosion démographique en cours en Afrique, qui doublera sa population d’ici là, va faire exploser les besoins. L’Afrique et l’Asie, continents qui devraient abriter 80 % de la population mondiale à l’horizon 2030, sont les régions qui vont probablement connaître le plus de stress hydrique du fait de ces tensions graves sur l’eau, en particulier en Afrique du Nord et en Afrique australe.

Une étude publiée par la revue Nature, en janvier 2018, indique que presque un tiers des villes dans le monde pourrait manquer de l’eau dans les 7 ans à venir, à cause du changement climatique, créant des conflits d’usage avec l’agriculture. La ville du Cap, en Afrique du Sud, a ainsi connu trois longues années de sècheresse à partir de 2015. Elle a dû instaurer des mesures drastiques de réduction de la consommation, et a failli se retrouver en situation de pénurie totale. Heureusement qu’en février 2018, la pluie s’est remise à tomber…

3. Le réchauffement climatique aggrave-t-il la situation ?

Le lien, entre réchauffement climatique et le grand cycle de l’eau (évaporation, saturation, condensation et précipitations), est unanimement reconnu par les scientifiques, y compris dans le dernier rapport des experts du Giec (Groupe Intergouvernemental des Experts du Climat). Localement, les conséquences dépendent de nombreux facteurs et ne sont pas toujours évidentes à prévoir. Globalement cependant, on sait que le réchauffement modifie le cycle hydrologique. Résultat : l’évaporation est plus massive, l’air absorbe plus d’humidité et les précipitations deviennent plus nombreuses et plus intenses, provoquant ici des inondations et ailleurs des sècheresses. Les études indiquent que les régions d’Afrique particulièrement touchées seront l’Afrique du Nord, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique australe. De multiples politiques d’adaptation devront donc être mises en œuvre.

4. Au fait, l’eau potable c’est quoi ?

Une eau est dite potable lorsqu’elle peut être consommée sans le moindre risque pour la santé. Pour être potable, l’eau doit garantir un certain nombre de propriétés : être inodore, incolore et sans saveur. Elle ne doit contenir ni bactéries ni virus, et ne pas dépasser la quantité de substances chimiques autorisées (métaux lourds, nitrates, hydrocarbures, pesticides). Sachant que les experts et scientifiques s’accordent à reconnaître que ces substances chimiques, même consommées à de très faibles quantités, finissent par avoir des conséquences sur la santé, à terme. Ainsi, en tant qu’autorité internationale chargée de la santé publique et de la qualité de l’eau, l’OMS dirige les efforts mondiaux de prévention de la transmission des maladies d’origine hydrique. À cette fin, elle produit des normes internationales sur la qualité de l’eau et sur la santé humaine, sous la forme de directives qui servent de base à l’élaboration de règles et de normes partout dans le monde.

5. Quelles sont les conséquences de la pénurie d’eau ?

Le manque d’eau potable a des conséquences sur tous les secteurs d’activités et sur toutes les catégories sociales. Selon l’OMS (Organisation mondiale de la santé), en 2016, près d’un milliard de personnes dans le monde n’avaient pas accès à une source d’approvisionnement en eau potable et un individu sur trois n’avait pas accès à des installations sanitaires (toilettes ou latrines), de même qu’un tiers des hôpitaux et des cliniques. Conséquences de cette réalité, les maladies diarrhéiques (choléra), provoquées par la consommation d’une eau non potable et de mauvaises conditions d’hygiène, ont causé plus d’un million de décès dans le monde en 2018. Ces maladies représentent la troisième cause de mortalité dans les pays en développement et la septième dans le monde.

Parmi les causes de la pénurie d’eau, il y a également la difficulté à accéder à une source naturelle, du fait des distances généralement trop longues à parcourir. En outre, le coût financier pour obtenir une source d’eau fiable peut s’avérer dissuasif. Conséquence : ce sont généralement les femmes et les enfants qui, en Afrique, s’attèlent à fournir de l’eau à la famille. Ils perdent donc l’essentiel de leur temps à chercher de l’eau au lieu d’aller à l’école ou au travail. La lutte pour l’approvisionnement en eau induit des tensions sociales (avec des risques de conflits) et économiques (avec des impacts sur l’agriculture et le développement), parfois accompagnées de violences.

6. Pourquoi le Maroc, comme d’autres pays, mise-t-il désormais sur les eaux « non conventionnelles » ?

Les ressources en eau non conventionnelles sont les eaux usées traitées, les eaux saumâtres dessalées, les eaux de recharge artificielle des nappes souterraines et la récupération des eaux de pluie. L’exploitation de ces ressources entre généralement dans la stratégie nationale des États pour la mobilisation des ressources en eaux face à la pénurie ou à la rareté de l’eau.

Ainsi le Maroc a-t-il adopté, depuis les années 1960, le dessalement d’eau de mer pour la consommation des ménages en eau potable.

Le Royaume chérifien a même annoncé, lors du 8eForum mondial de l’eau, à Brasila, au Brésil, en mars 2018, un recours plus important aux ressources hydriques non conventionnelles. Charafat Afilal, la secrétaire d’État marocaine responsable de l’Eau, a dévoilé les nouveaux objectifs du pays en la matière : « Le Maroc est un pays impacté par les changements climatiques et il ne peut se limiter uniquement aux précipitations. Il faut s’ouvrir sur les autres ressources qui ne sont pas affectées par ces changements comme le dessalement de l’eau de mer ou encore la réutilisation des eaux usées épurées. »

De même, pour l’Émirat d’Ajman, Veolia a conçu et développé la réutilisation à 100 % des eaux usées. Le réseau d’assainissement collecte 100 millions de litres d’effluents issus chaque jour des foyers, des entreprises et de l’industrie. Une fois traitée, l’eau est réutilisée pour irriguer les complexes touristiques, les parcours de golf et les fontaines, ou encore les installations industrielles. Un exemple abouti d’économie circulaire.

Pour l’Émirat d’Ajman, Veolia a conçu et développé la réutilisation à 100 % des eaux usées.

7. ReUse : comment réutiliser les eaux usées traitées ?

Le Maroc, toujours lui, vise la réutilisation (ReUse en anglais) de quelque 325 millions de m3d’eaux usées à l’horizon 2030, ce qui suppose de passer d’une pratique de « traitement et rejet » à des solutions de « traitement et réutilisation », selon les mots de la Secrétaire d’État marocaine responsable de l’Eau. Il s’agit là d’un objectif ambitieux.

Le Maroc n’est d’ailleurs pas seul à s’engager dans cette voie. Les expériences se multiplient en Afrique.

Les eaux usées recyclées sont encore majoritairement utilisées dans l’agriculture, pour l’irrigation des plantes, ou l’arrosage des espaces verts. Parfois également pour le maraichage, à condition que le niveau d’épuration de l’eau soit compatible avec cet usage. Enfin, niveau parfait de l’économie circulaire appliquée au petit cycle de l’eau : la potabilisation des eaux usées, grâce à un traitement complexe est également possible.

8. Quels sont les avantages économiques de la réutilisation des eaux usées traitées pour l’eau potable ?

Sur des territoires confrontés à la rareté de la ressource en eau, le recyclage des eaux usées en eau potable apporte de nombreux avantages sur plan économique.
Les eaux usées ont ainsi l’avantage de se trouver précisément là où les besoins en eau potable se font sentir. Ce qui offre un moyen simple et décentralisé d’accéder à cette ressource. Cela évite surtout, en cas de tension sur la ressource, d’aller chercher de l’eau de plus en plus loin et de l’acheminer coûteusement. Car le coût d’installation des canalisations est important, avec la maintenance du réseau et des fuites possibles, qui, partout dans le monde, font perdre de la précieuse ressource.
Les eaux usées sont aussi la seule ressource qui croît avec les besoins. Dans ce cas-là, plus les populations consomment, plus elles rejettent, plus elles créent de la ressource.
L’ensemble de ces facteurs permet de rationaliser les coûts et positionne la réutilisation des eaux usées traitées en eau potable comme une solution souvent très avantageuse d’un point de vue économique.

9. Quels sont les avantages environnementaux de la réutilisation des eaux usées traitées en eau potable ?

La réutilisation des eaux usées permet de se rapprocher d’un modèle d’économie circulaire particulièrement avantageux pour la protection de l’environnement. Car la réutilisation des eaux usées évite de prélever localement les rares ressources en eau douce.

Mais, surtout, en multipliant les cycles de traitement de l’eau, elle permet de réduire drastiquement la charge polluante rejetée dans le milieu. Avec moins de polluants rejetés dans le milieu, les eaux naturelles qui restent, quand elles sont prélevées pour la potabilisation, sont plus faciles et moins chères à traiter puisque moins polluées. C’est ce qu’on appelle l’accroissement de la productivité des eaux brutes.

10. Quels pays dans le monde recyclent les eaux usées traitées en eau potable ?

Le choix du recyclage des eaux usées en eau potable était une option avant-gardiste au XXe, comme l’était il y a quelques années encore le dessalement. Mais, la demande en eau et le stress hydrique grandissant, cette solution, dont les coûts ont très fortement baissé au début du XXIesiècle, se banalise progressivement. Pionnière absolue en matière de recyclage des eaux usée, la ville de Windhoek, en Namibie, recycle ses eaux usées en eau potable, depuis… 1968. Et une nouvelle usine de recyclage des eaux usées a été mise en service en 2002, qui met en œuvre des technologies de pointe apportées par Veolia.
L’agence de l’eau du comté d’Orange, près de Los Angeles, en Californie, aux États-Unis, a également choisi la solution du retraitement des eaux usées pour les rendre à nouveau potables. Idem pour la ville de Goulburn en Australie.

Singapour s’est également lancée sur cette voie. Aujourd’hui, près de 30 % de l’eau potable de la cité État du sud-est asiatique sont issue des stations de retraitement des eaux usées.

Plus récemment, la société d’assurance sud-africaine, Old Mutual, basée au Cap, a carrément quitté le réseau d’eau potable de la ville pour assurer seule l’approvisionnement en eau potable de ses 9 000 salariés via le recyclage des eaux usées.

11. Pourquoi Windhoek, la capitale de la Namibie a-t-elle choisi de rendre potables les eaux usées ?

L’une usine de recyclage des eaux usées de Goreangab, près de Windhoek, bordée par le désert.

Située entre les déserts de Namibie et de Kalahari, la Namibie est considérée comme le pays le plus aride d’Afrique australe. Windhoek, la capitale namibienne, peuplée de 300 000 habitants, supporte un stress hydrique chronique et vit sous la menace permanente d’une pénurie d’eau. La Namibie connaît une moyenne de précipitations de 250 mm d’eau par an, ce qui est très peu (mais reste bien au-dessus de la plupart des territoires qui bordent le Sahara).

La chaleur en Namibie entraîne l’évaporation de 83 % de cette eau, tandis que seul 1 % de la ressource arrive à s’infiltrer dans le sol. Les autorités locales ont donc décidé, dès 1968, de construire une usine de recyclage des eaux usées de Goreangab, permettant à Windhoek de devenir la première ville au monde à produire directement de l’eau potable à partir des eaux usées municipales. Ce qui a permis à la capitale namibienne d’offrir pendant plus de 20 ans à sa population une source d’approvisionnement en eau supplémentaire.

Au lendemain de son indépendance, en 1990, Windhoek enregistre une croissance démographique et la municipalité cherche à moderniser ses installations d’approvisionnement en eau potable. En 2001, elle signe un contrat d’exploitation et d’entretien avec Wongok (Windhoek Goreangab Operating Company), un consortium composé de Veolia, Berlinwasser Internationalet Wabag, afin d’améliorer les procédés de traitement de l’eau et d’augmenter la capacité de production d’eau potable du site de Goreangab

12. Recycler les eaux usées en eau potable, à Windhoek, comment ça marche ?

Mise en service en 2002, la nouvelle usine de potabilisation de Windhoek permet aujourd’hui de satisfaire 35 % des besoins en eau potable de la ville et de son agglomération, alimentant près de 400 000 personnes grâce à une capacité de 21 000 m3par jour.

L’eau, qui provient du barrage de Goreangab et de la station d’épuration de Gammans, est traitée selon des normes rigoureuses. Wingoc met en œuvre un traitement à barrières multiples. Des filtres physiques ainsi que des traitements bactériens et chimiques garantissent la conformité de l’eau potable aux normes de l’Organisation mondiale de la santé. Un système sophistiqué, et robuste à la fois, qui fait franchir à l’eau plusieurs étapes de traitement, destinées à éliminer tous les polluants et les contaminants. Ces multiples traitements, couplés à des programmes de biosurveillance rigoureux, garantissent une eau potable de qualité, sans aucun danger pour la santé.

13.Quelles précautions sont prises pour la santé humaine à Windhoek ?

La modernisation de l’usine d’eau potable de Windhoek a permis d’utiliser une technologie de pointe, capable d’éliminer tout risque sanitaire. Le système « à barrières multiples » reproduit le cycle naturel de l’eau en plusieurs phases :pré-ozonation, coagulation/floculation, flottation, filtration sur sable, ozonation, filtration, adsorption sur charbon actif, ultrafiltration et chloration. Au total, une dizaine d’heures sont nécessaires, de la réception des eaux usées de la station d’épuration jusqu’à la sortie de station d’eau potable. Par ricochet, cette eau recyclée a entraîné l’installation de nouveaux points de distribution dans les townships ainsi que des sanitaires supplémentaires. Des aménagements qui ont non seulement amélioré la santé des populations, mais également garanti la sécurité des personnes les plus vulnérables.

14. Quelle différence entre la réutilisation directe ou indirecte des eaux usées ?

Windhoek est le plus ancien projet de réutilisation directe des eaux usées épurées pour la production d’eau potable. Cela veut dire que l’eau est ensuite directement consommée, même si elle est mélangée aux trois quarts avec des eaux naturelles, qui sont elles aussi épurées. L’expérience acquise sur ce projet a démontré la faisabilité de ce genre de réutilisation et l’absence d’effets négatifs sur la santé publique.

Mais la réutilisation indirecte d’eaux usées épurée pour la production d’eau potable est également possible. Il s’agit alors de recharger des nappes phréatiques utilisées pour la production d’eau potable, comme c’est le cas en Californie. Autre possibilité : des réservoirs de surface (comme les châteaux d’eau) peuvent également être rechargés en aval pour assurer l’approvisionnement en eau potable des populations.

15. Peut-on reproduire l’exemple de Windhoek ? À quelles conditions ?

Le modèle de réhabilitation des eaux usées de Windhoek, mérite d’être généralisé. Le succès de cette expérience est tel que l’usine attire aujourd’hui de plus en plus de visiteurs. Le président du Botswana voisin et plusieurs délégations officielles du pays, qui envisageraient l’installation d’une station similaire dans leur pays, sont venus découvrir l’usine de Wingoc en 2018.

Mais il faudra aussi s’assurer que les populations sont bien conscientes des situations de stress hydrique qui s’annoncent, pour qu’elles acceptent de recycler leurs eaux usées afin de mieux satisfaire leur demande d’eau potable. En d’autres termes, la réutilisation des eaux usées traitées ne peut être envisagée que si les ressources en eau potable ne suffisent plus à approvisionner les populations en eau potable. Et dans ce cas, elle doit souvent être accompagnée d’efforts d’éducation, d’un changement d’approche culturelle, sur les eaux usées traitées et l’assainissement.

16. La réutilisation des eaux usées, une solution d’avenir pour l’Afrique ?

Malgré tous les avantages économiques et environnementaux et quels que soient la situation de stress hydrique ou encore les garanties techniques et scientifiques concernant l’hygiène et la santé, les projets de réutilisation des eaux usées épurées en eau potable, inquiètent parfois.

Et il est donc très important de répondre aux interrogations des communautés. Tout projet de réutilisation des eaux usées traitées en eau potable nécessite des efforts transparents et honnêtes d’explication et de sensibilisation par des acteurs et des décideurs qui ont fait leurs preuves et qui partagent aussi des valeurs qui inspirent la confiance. Toutes les parties prenantes doivent être incluses dans ce projet.

Ceci étant dit, personne ne doute que le recyclage des eaux usées est une solution d’avenir, y compris pour la consommation humaine. Une solution qui combine des technologies de pointe imitant le cycle naturel de l’eau et un concept d’économie circulaire adapté à la gestion de l’eau du futur. Dans un rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau, qui fut présenté en mars 2017 à Durban, les eaux usées sont qualifiées de « nouvel or noir ».

La Nasa, dont les astronautes sont confrontés à des conditions de vie extrêmes, a également développé un projet avant-gardiste de recyclage des eaux usées intitulé ; « Water Recovery System ». Peut-être le célèbre centre de recherche spatial des États-Unis s’est-il inspiré du roman de science-fiction écologique, Dune, de Frank Herbert (1965), qui se déroule sur la planète-désert Arrakis, où l’eau est si précieuse que les habitants (les Fremen) recyclent tous les fluides du corps, y compris la transpiration et l’humidité de la respiration, dans des combinaisons futuristes (les Distilles) pour être consommés…

Comme quoi, l’idée de réutiliser les eaux usées traitées pour l’eau potable ne date pas d’hier, mais pourrait bien devenir LA solution d’avenir pour une économie circulaire de l’eau au XXIe siècle.

17. Pourquoi l’Afrique pourrait devenir pionnière en matière de réutilisation des eaux usées ?

Le rapport 2017 du Giec mentionne 19 grandes zones dans le monde qui subiraient un stress hydrique anormalement élevé. Beaucoup de pays africains sont concernés par ce stress : le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, l’Égypte, la Libye, l’Afrique du Sud ainsi que de nombreuses régions d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique australe.

L’Afrique, confrontée à une explosion démographique (avec un doublement de la population en 20 ans), au lieu de subir le changement climatique et ses conséquences dévastatrices sur les ressources en eau, pourrait devenir, sur certains aspects, un véritable laboratoire d’innovation sur la gestion de l’eau, où s’inventeraient les pratiques de demain. Voici deux exemples qui illustrent la manière dont les pays du Sud innovent en matière de gestion de l’eau.

1. C’est en Afrique, au Niger pour être précis, que la Seen (Société d’exploitation des eaux du Niger) déploie, avec l’aide de la startup Citytaps et d’Orange, un compteur d’eau révolutionnaire qui permet de payer sa consommation en prépaiement via son téléphone mobile.

Au Niger, un compteur d’eau révolutionnaire permet de payer sa consommation en prépaiement.

2. Dans une interview donnée en mars 2019 à Environnement Magazine, Tristan Mathieu, délégué général de la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau, reconnaît qu’en matière de réutilisation des eaux usées traitées la France ne s’est pas adaptée à la nouvelle donne du changement climatique et qu’elle est globalement en retard, comparé surtout à des pays comme l’Espagne, qui réutilise 14 % de ses eaux usées. Les raisons : une insouciance passée concernant la disponibilité de la ressource et des normes si contraignantes qu’elles limitent les autorisations.

Comme elle est en train de le faire, sur le digital et les énergies renouvelables, l’Afrique pourrait bien transformer, dans le secteur de l’eau, ses contraintes (hydriques) en opportunités, afin de mieux inventer et s’approprier de nouvelles pratiques vertueuses. Comme elle le fait déjà, avec la réutilisation des eaux usées traitées en eau potable à Windhoek, en Namibie.

Par Jean-Célestin Edjangué et Christoph Haushofer, en partenariat avec Veolia.

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