À l’heure où la pandémie du coronavirus continue de faire des ravages humains et économiques dans le monde, les défenseurs de la planète évoquent l’intérêt de cette crise sanitaire sur la préservation de l’environnement. Dans une étude menée par la chaire Économie du climat de l’université Paris-Dauphine, les auteurs constatent que le confinement du monde [marqué par l’arrêt quasi total des transports et du tourisme] pourrait engendrer un recul historique du rejet des émissions de CO2 dans l’atmosphère : 14 % par rapport à 2019. C’est dix fois plus que lors de la crise financière de 2009.
L’Afrique qui ne représente qu’à peine 4 % des émissions mondiales de CO2, mais qui en paie le plus lourd tribut, pourrait ainsi tirer profit de la situation. À condition cependant que cette baisse des émissions de CO2 ne soit pas éphémère, comme l’a souligné Christian De Perthuis, le fondateur de la chaire Économie du climat de l’université Paris-Dauphine. « Il y aura bien sûr une reprise des émissions, quand l’économie se remettra en mouvement. Mais rien de comparable avec celle qui avait succédé à la crise financière de 2009. La chute a été bien plus violente et je ne vois pas un redémarrage rapide de l’économie. Le monde a beaucoup changé. On ne va pas revenir 10 ans en arrière » pense l’expert.
Les gouvernements doivent adopter des plans de relance peu polluants
Les défenseurs de l’environnement ne sont pas tous optimistes quant aux stratégies de relance économique envisagées dans les pays industrialisés. En France par exemple, la climatologue Corinne Le Quéré, présidente du Haut conseil pour le climat, juge l’édifice des politiques climatiques nationales de son pays trop fragile, à l’heure où le secteur du tourisme, les compagnies aériennes réclament des aides d’État d’urgence. Les changements structurels n’ont pas été faits, assure-t-elle. « Les décisions du gouvernement vont avoir des répercussions importantes. Il est donc essentiel de placer les enjeux climatiques au cœur des plans post-crise, orientés de manière durable vers le bas carbone ». À l’opposé de la demande du patronat français, relayée par son syndicat, le Medef, qui a écrit à Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique, pour demander un moratoire sur la préparation de nouvelles dispositions énergétiques et environnementales… Une position assez décalée par rapport aux initiatives qui fleurissent un peu partout dans le monde pour exiger des plans de relance durables et que recensent nos confères de Novethic .
En ce qui concerne l’Afrique, la réponse à la récession provoquée par Covid-19 devrait consister pour les partenaires au développement à placer leur soutien financier aux pays en développement, sur des bases climatiques. « Cette aide devrait principalement bénéficier aux initiatives alignées sur l’accord de Paris, en utilisant les mécanismes de financement des subventions pertinents de manière plus catalytique » a déclaré Ludmila Azo, PDG d’I-mpacting.com, une société de conseil dédiée au soutien des organisations publiques et privées dans l’accès à l’énergie et l’action climatique.
Différentes contributions d’experts en environnement ont été publiées dans le cadre de la cinquantième édition de la journée mondiale de la terre, le 22 avril 2020. Un évènement qui a pris un accent tout particulier cette année, en plein confinement lié à la lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19. Une catastrophe sanitaire qui ne devrait pas modifier le fait que le changement climatique demeure la plus grande menace qui pèse sur l’humanité, aujourd’hui, demain et à long terme.
Boris Ngounou