Cinq gardes forestiers et un soldat ont été tués le 8 février 2022 dans le parc national du W, au nord du Bénin. Cette attaque attribuée à des rebelles terroristes, porte atteinte aux efforts de conservations déployés dans ce parc naturel, classé au Patrimoine mondial de l'Unesco.
L’après-midi du 8 février 2022 a été tragique dans le parc national du W, situé au nord du Benin. Une équipe de rangers a été prise en embuscade alors qu’elle effectuait une patrouille à la limite nord du parc. Le bilan provisoire fait état de six morts dont cinq parmi les rangers, et un agent des Forces armées béninoises ainsi que d’une dizaine de blessés. Le bilan serait plus lourd selon des sources locales. Une dizaine de morts aurait été recensée et plusieurs rangers et militaires seraient portés disparus.
Parmi les victimes figure un ancien militaire français de 50 ans, qui avait été chef du département de lutte anti braconnage au sein d’African Parks, dans le cadre d’un contrat en République centrafricaine (RCA). Il aurait été recruté en 2018 pour ce contrat au Bénin.
Selon African Parks, l’organisation sud-africaine de défense de l’environnement qui gère ce parc depuis 2017, dans le cadre d’un accord de dix ans avec le Bénin, des renforts militaires et des gardes forestiers supplémentaires ont été déployés dans le secteur.
L’attaque n’a pas encore été revendiquée, mais des soupçons pèsent sur des groupes djihadistes qui seraient arrivés par le Sahel.
Des attaques récurrentes
Classé au Patrimoine mondial de l’Unesco (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture) le parc national du W est une zone protégée transfrontalière partagée entre le Bénin, le Burkina Faso et le Niger. Sa partie béninoise, s’étend sur plus de 8 000 km2 et forme avec le parc national contigu, de la Pendjari, une section importante du W-Arly-Pendjari (WAP), un complexe transfrontalier d’importance mondiale qui compose l’un des plus vastes écosystèmes sauvages intacts d’Afrique de l’Ouest.
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L’importance de cet espace et les menaces auxquelles il est confronté ont conduit le gouvernement béninois, en septembre 2019, à se coordonner avec African Parks pour élaborer un plan d’intervention prioritaire (PIP) et le sécuriser de toute urgence. Mais la récurrence des attaques dans cette aire protégée démontre que beaucoup reste à faire. Juste avant l’attaque du 8 février dernier, le parc a enregistré une attaque djihadiste le 2 décembre 2021. Selon les autorités béninoises, en mai 2019 des présumés djihadistes ont enlevé deux touristes français dans le parc national de la Pendjari, après avoir tué leur guide local. Il s’en est suivi l’attaque d’un poste de police des frontières en février 2020 et l’arrestation d’un djihadiste en mars 2021 dans le même parc.
L’impact écologique
Outre la perte des vies humaines, ces attaques djihadistes s’accompagnent très souvent d’actes de pillage, perpétrés sur une faune sauvage menacée de disparition. Selon African Parks, le parc national du W abrite les dernières populations viables de plusieurs espèces animales, notamment les guépards d’Afrique du Nord-Ouest, la sous-population des lions d’Afrique de l’Ouest et les antilopes tsessebe. On y trouve également des lamantins d’Afrique de l’Ouest, une espèce connue pour remonter le fleuve Niger qui le borde.
Par ailleurs, l’offensive progressive des djihadistes dans la zone réduira considérablement le nombre de visites écotouristiques. Les recettes apportées par ces derniers sont pourtant nécessaires à la gestion des charges liées à la sécurisation du parc, notamment la formation et le paiement des rangers.
Boris Ngounou