Greenpeace Afrique et le peuple Banen dénoncent à nouveau, dans un communiqué publié le 23 juillet 2020, le projet du gouvernement camerounais visant à couper les arbres dans la forêt d’Ebo, située dans la région du Littoral. Ignorant les précédentes mises en garde de l’ONG et des communautés locales, les hautes instances de l’État viennent d’approuver l’ouverture de 68 385 hectares de forêt vierge à l’exploitation forestière. Un décret fatal pour un point chaud de la biodiversité, capable de capter 35 millions de tonnes de carbone.
Le gouvernement camerounais fonce tête baissée vers le rasage de la forêt d’Ebo. Le Premier ministre Joseph Dion Ngute a signé le 14 juillet 2020 avec l’approbation de la présidence de la République, un décret visant à exploiter 68 385 hectares d’une forêt vierge située dans la région du Littoral au Cameroun. C’est environ la moitié de la taille de la ville de Londres qui sera classée dans le domaine privé de l’État avant d’être transformée en une concession d’une trentaine d’Unités forestières d’Aménagement (UFA), comme voulu le 4 février 2020 par le ministère camerounais des Forêts et de la Faune.
Dans un communiqué datant du 23 juillet 2020, l’ONG environnementale Greenpeace voit en ce décret du Premier ministre, la condamnation à mort d’un point chaud de la biodiversité. « Nous demandons à nouveau au gouvernement camerounais d’annuler les plans d’exploitation industrielle dans la forêt d’Ebo et de la désigner comme zone de conservation communautaire à la place », a déclaré Sylvie Djacbou, chargée de campagne forêt chez Greenpeace Afrique. Pour les 40 communautés riveraines de la forêt d’Ebo, l’acte du gouvernement constitue un accaparement des terres appartenant aux autochtones. « La grande majorité des Banen disent non à cette grave injustice. La forêt d’Ebo représente avant tout l’identité du peuple Banen et leur collectif utilisera tous les moyens légaux pour l’annulation de cette décision du gouvernement », a déclaré l’un des chefs Banen, Victor Yetina de l’association Munen retour aux sources, créée spécialement pour la protection du patrimoine foncier des Banen.
Le gouvernement fait la sourde oreille ?
Il s’agit ici de la nième alerte lancée par Greenpeace Afrique et les populations locales. Les deux parties s’étaient déjà alliées le 2 avril 2020 pour exiger l’annulation immédiate des plans du gouvernement visant à transformer la forêt d’Ebo (étendue sur une superficie totale de 150 000 hectares) en deux concessions forestières. Des demandes qui viennent d’être ignorées par le récent décret du Premier ministre camerounais. Il en est de même des appels des ONG internationales en vue du respect de la décision prise en 2006 par l’État portant classement de la forêt d’Ebo en parc national. L’acte du Premier ministre a également fait fi des engagements internationaux du Cameroun ainsi qu’il passe outre la loi promulguée le 20 juillet 2020, autorisant le président de la République Paul Biya à ratifier l’accord sur la conservation des gorilles et de leurs habitats, adoptés le 26 octobre 2007 à Paris en France.
Ebo est une zone de forte concentration de biodiversité. Elle abrite une population isolée de gorilles de l’Ouest et d’importantes populations de chimpanzés du Nigéria — Cameroun, des éléphants de forêt, des perroquets gris. On y retrouve de nombreuses autres espèces inscrites sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et même, 12 essences d’arbres inconnues à la science. Cette forêt dispose d’une capacité de capture de 35 millions de tonnes de carbone.
Boris Ngounou