À l’occasion de la 24e Conférence de l’ONU sur le climat en Pologne (COP24,) la Banque mondiale a annoncé la mobilisation d’environ 200 milliards de dollars de financements climatiques. Le quart de cette enveloppe sera consacré au financement des projets d’adaptation aux effets des changements climatiques dans les pays du Sud, notamment en Afrique.
La Banque mondiale a décidé de rompre avec les habitudes en matière de finance climatique. Au moment où les financements concernant le climat se concentrent en majorité sur les actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre, notamment sur le développement des énergies renouvelables, l’institution de Bretton Woods s’engage, pour son plan 2021-2025, à soutenir l’adaptation aux effets des dérèglements climatiques dans les pays en voie de développement.
« Nous devons combattre les causes mais aussi permettre de nous adapter aux conséquences qui sont souvent les plus dramatiques pour les plus pauvres du monde », a commenté Kristalina Georgieva, la directrice générale de la Banque mondiale. Et selon John Roome, responsable du dossier climat de la Banque, les besoins en adaptation aux désastres climatiques seront beaucoup plus accentués en Afrique, notamment dans les pays tels que le Tchad et le Mozambique. « Si nous ne réduisons pas les émissions et ne mettons pas en place des mesures d’adaptation maintenant, il y aura 100 millions de personnes supplémentaires vivant dans la pauvreté d’ici à 2030 », a-t-il insisté. Et le nombre de « migrants climatiques pourrait se multiplier, pour atteindre 143 millions d’ici à 2050 dans seulement trois régions (Afrique, Asie du Sud et Amérique latine) ».
De manière concrète, ces montants permettront, entre autres, de financer la construction de digues, d’habitats surélevés et de systèmes d’alerte météo. Des infrastructures qui permettront de surmonter l’augmentation du niveau des mers, les inondations, et les sécheresses.
La Banque mondiale répond aux enjeux de l’Afrique à l’issue de la COP 24
L’annonce de Banque mondiale, à la faveur de la COP 24 de Katowice en Pologne, est forcément consécutive à l’une des revendications des États africains, exprimée depuis la COP 22 de 2016 au Maroc : la destination des fonds.
Les pays du Nord favorisent ainsi le plus souvent le financement des projets de réduction d’émissions polluantes, alors que les pays africains ont surtout besoin de l’aide pour s’adapter au changement climatique. « C’est de la mauvaise foi », déplore Nicaise Moulombi de l’ONG gabonaise Croissance et environnement, car soutient-elle, « L’Afrique émet moins de 4 % du total mondial des gaz à effet de serre, mais elle subit de plein fouet le réchauffement climatique ».
Par ailleurs, la Banque mondiale a impulsé l’exemple à suivre par les pays du Nord. Car c’est au total, près de 200 milliards de dollars, que la banque entend mobiliser entre 2021 et 2025, pour aider les pays en développement face au changement climatique, soit un « doublement » par rapport à la période précédente. « C’est un signal important, à l’endroit de la communauté internationale, pour qu’elle fasse de même », estime la Banque mondiale. Cette démarche constitue un autre enjeu de l’Afrique, à la COP24. Les pays les plus pauvres saisissent l’occasion, pour demander aux pays du Nord de tenir leur promesse de porter à 100 milliards d’euros par an, d’ici 2020, leurs financements aux politiques climatiques des pays Sud. Alors que, d’après une étude de l’ONG Oxfam, publiée en mai dernier, moins de la moitié de ces fonds ont été débloqués.
Et sur le continent africain, ce manquement des pays développés à respecter leurs engagements est très mal vécu par les organisations de la société civile. « Chaque année, l’Afrique subit sécheresses et inondations record. Ces financements ne sont pas une faveur qu’accordent les pays du Nord aux pays africains. C’est simplement de leur responsabilité. Et la manière dont ces négociations avancent ne nous plaît pas, car c’est vraiment lent », s’indigne Augustin Ndjiamnshi, président de l’Alliance panafricaine pour la justice climatique.
Boris Ngounou