En Côte d’Ivoire, le coordonnateur du Programme de gestion du littoral ouest-africain (Waca) vient de faire un plaidoyer pour la mise sur pied des tribunaux spécialisés dans la répression des crimes environnementaux. Le professeur Ochou Delfin est allé plus loin en demandant également la création d’une police environnementale.
Le renforcement des mesures législatives en matière de protection de l’environnement devient urgent en Côte d’Ivoire. Avec un taux de déforestation annuel de 8,9 % selon le rapport 2020 de l’Organisation des Nations unies (ONU) sur la déforestation, la Côte d’Ivoire est en voie de perdre la totalité de son couvert forestier national d’ici à 2034. Pour inverser la tendance, le Programme de gestion du littoral ouest-africain (Waca) en Côte d’Ivoire, lance un plaidoyer en faveur de l’institutionnalisation des tribunaux spécialisés en matière environnementale.
Le professeur Ochou Delfin, coordonnateur du Waca s’est longuement exprimé sur la question lors d’une conférence de presse tenue le 30 mars 2021 à Abidjan la capitale économique de la Côte d’Ivoire. « Il faut une justice environnementale en Côte d’Ivoire. L’environnement aussi doit avoir son tribunal », déclare-t-il, estimant « que couper un arbre est un crime environnemental ». L’environnementaliste va plus loin, demande également une police environnementale.
La répression des crimes environnementaux en Côte d’Ivoire est jusqu’ici confrontée à un vide juridique, malgré les demandes précédemment exprimées. En avril 2019, le sénateur Jérôme Durain et les membres du groupe socialiste au sénat ivoirien avaient déposé une proposition de loi dans ce sens, mais en vain. Les parlementaires ont notamment demandé l’introduction des crimes environnementaux dans le Code pénal. Pour soutenir leur demande, les auteurs de la proposition de loi s’étaient appuyés sur l’affaire du Probo Koala, dans laquelle un bateau affrété par une société suisse a déversé des centaines de tonnes de déchets toxiques à Abidjan en 2006, tuant 17 personnes et causant des problèmes de santé chez plus de 100 000 autres.
La rareté des tribunaux environnementaux en Afrique
La Côte d’Ivoire est loin d’être le seul pays africain dépourvu de tribunal environnemental. D’après une étude du programme des Nations unies pour l’environnement, publiée en 2016, seuls cinq pays d’Afrique subsaharienne à savoir la Gambie, l’île Maurice, le Nigeria, le Soudan et le Kenya ont une cour environnementale ou des tribunaux intégrés à l’administration. Et pourtant ces juridictions spécialisées sont devenues des nécessités pour tous les pays, compte tenu de la récurrence des crimes environnementaux. « La spécialisation des tribunaux se justifie par l’augmentation des litiges complexes dans le domaine environnemental et cela permet une meilleure interprétation du droit », explique Cindy Salim, juriste auprès de la fondation allemande Konrad Adenauer au Kenya.
Les derniers travaux dans le domaine de la législation environnementale en Côte d’Ivoire ont eu lieu en septembre 2020. Le ministère ivoirien de l’Environnement et du Développement durable avait organisé un atelier national de validation du projet de Loi portant Code de l’environnement et de ses décrets d’application. Le nouveau code de 287 articles permettra à la Côte d’Ivoire d’avoir un code multisectoriel qui intègre les composantes de l’environnement telles que la déforestation, l’érosion marine, l’agriculture et les aspects des changements climatiques qui n’étaient pas pris en compte par l’ancien code de l’environnement adopté le 3 octobre 1996.
Boris Ngounou