Le ministre égyptien des Ressources en eau et de l’Irrigation, Mohamed Abdel-Atti, a annoncé la construction de plusieurs stations d’épuration dans le Sinaï. Ce projet a été confié à Armed Forces Engineering Authority (AFEA), le génie militaire égyptien.
En Égypte, l’eau devient une denrée rare, en particulier pour l’agriculture. Le gouvernement égyptien tente de faire face à ce défi. Il y a un mois, le pays a inauguré un barrage à Assiout en Haute-Égypte, construit par une filiale de Vinci, qui produit de l’électricité mais fournit également de l’eau pour l’irrigation. Pour améliorer encore les capacités d’irrigation, les autorités envisagent de construire plusieurs stations d’épuration à l’est du canal de Suez, dans le Sinaï. Le projet est confié à Armed Forces Engineering Authority (AFEA), le génie militaire égyptien. Mohamed Abdel Atti a précisé que ces installations traiteraient aussi bien des eaux usées domestiques, qu’industrielles et agricoles.
500 000 bénéficiaires dans le Sinaï
Pour le développement de son agriculture et notamment l’essor des cultures de céréales et d’agrumes, l’Égypte s’est dotée d’un long drain de 106 km qui canalise les eaux usées agricoles depuis 1914. Baptisé Bahr al-Baqar, il part du gouvernorat de Dakahlia vers Sharqia, du gouvernorat d’Ismailia vers le gouvernorat de Port-Saïd ; la partie la plus longue se trouve dans le gouvernorat de Sharqia, plus à l’est du Sinaï.
Dans les années 70, les réseaux d’égouts et les eaux industrielles de la région ont été reliés à ce drain. Et une partie de ces eaux se déverse directement dans la nature, plus exactement dans le lac Manzala. D’une superficie de 180 000 hectares, ile est situé dans le gouvernorat de Port-Saïd. Sa situation a fait l’objet d’une étude de l’ingénieur écologue Mamdouh Salem Seraj. « Le drain constitue actuellement une menace, car il contient des substances organiques, des engrais et des pesticides qui ont un impact important sur l’environnement maritime, causant un déséquilibre écologique », avait constaté l’écologue en 2015.
Les autorités égyptiennes ont donc décidé de construire une station d’épuration près du lac. « Le traitement sera effectué conformément aux normes avancées de sécurité », a tenu à rassurer Ragab Abdel-Azeem, premier vice-ministre au ministère des Ressources en eau et de l’Irrigation. Cette usine de traitement des eaux usées sera l’une des plus grandes d’Afrique du Nord. Elle offrira une capacité de production de 5 millions de m3 par jour. L’eau traitée sera destinée à l’irrigation. AFEA estime qu’elle permettra d’irriguer plus de 160 000 hectares, bénéficiant ainsi à près 500 000 personnes.
L’auto-alimentation en énergie d’une station d’épuration
La construction de stations d’épuration dans le Sinaï ne répond pas seulement au besoin en eau de l’agriculture, ni uniquement à la nécessité de lutter contre la pollution du lac Manzala. En janvier 2018, le gouvernement égyptien a inauguré un gigantesque parc industriel dans la région. Et il faut donc aussi traiter les eaux qui seront rejetées par les usines du parc. Dans la ville de Mahmasa, gouvernorat d’Ismaïlia, AFEA va donc construire une autre station d’épuration, d’une capacité d’un million de m3 d’eau par jour. L’eau traitée servira à irriguer plus de 20 000 hectares.
Enfin, à Yellow Mountain, il existe déjà une station d’épuration construite par Arab Contractors en 1995. Il s’agit de la première phase d’un projet dont la deuxième a été inaugurée en janvier 2018. La première phase a doté l’installation d’une capacité de production de 2,5 millions de m3 par jour. Cette eau est aussi destinée à l’irrigation, notamment de vastes plantations d’agrumes, sur plus de 60 000 hectares. La deuxième phase permettra d’irriguer des champs qui bénéficieront à 2,5 millions de personnes dans le Sinaï. Les boues issues du traitement des eaux usées servent à fabriquer du biogaz qui est utilisé pour faire tourner les machines. Selon Mohamed Abdel-Wahab, directeur de l’usine, la station produit 60 % de l’énergie nécessaire à son fonctionnement.
Jean Marie Takouleu