WCEF2022 #2. Notre série en partenariat avec le fonds d’innovation finlandais Sitra.
Le Rwanda accueille du 6 au 8 décembre 2022 des chefs d’entreprise, des acteurs politiques et des spécialistes de l’Afrique et du monde entier pour la sixième édition du Forum mondial de l’économie circulaire (WCEF2022). Cet évènement est une initiative mondiale du gouvernement finlandais et du Fonds d’innovation finlandais Sitra. Le WCEF2022 est organisé en plusieurs sessions à Kigali et à suivre aussi en ligne. Le forum se décline également en plusieurs évènements sous-régionaux – des « studios » – organisés dans plusieurs métropoles subsahariennes.
Le studio de Yaoundé sera consacré à l’économie circulaire au Cameroun et en Afrique centrale. À Lagos au Nigeria, un studio sera consacré à l’Afrique de l’Ouest. Le studio de Lusaka sera dédié à l’économie circulaire en Zambie et dans l’ensemble de l’Afrique de l’Est, tandis que l’évènement du Cap en Afrique du Sud évaluera le développement de l’économie circulaire en Afrique australe. Un cinquième studio au Rwanda renforcera le forum principal à Kigali.
Plusieurs délégations attendues à Kigali
Dans la capitale du Rwanda, plusieurs personnalités prendront part aux échanges, notamment Jeanne d’Arc Mujawamariya, la ministre rwandaise de l’Environnement, Peter Díez, le directeur des Affaires internationales au ministère néerlandais des Infrastructures et de la Gestion des eaux, Peter Desmond, le cofondateur du Réseau africain d’économie circulaire (Acen), Kari Herlevi, le directeur de projet, Collaboration globale, Solutions de durabilité, au Sitra ou encore Maxwell Gomera, le représentant résident du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) au Rwanda.
Le WCEF2022 est soutenu par plusieurs partenaires au développement, notamment l’Alliance africaine pour l’économie circulaire (Acea), le réseau africain pour l’économie circulaire (Acen) ou encore la Banque africaine de développement (BAD). Au cours des prochaines années, la banque panafricaine basée à Abidjan en Côte d’Ivoire veut contribuer à l’adoption de l’économie circulaire par des gouvernements en Afrique. C’est pour mettre en œuvre cette stratégie que la BAD a lancé la Facilité africaine pour l’économie circulaire (Acef) qui est un partenaire à part entière du sixième Forum mondial de l’économie circulaire.
L’économie circulaire, une nécessité pour le développement durable
Ce fonds fiduciaire permettra de canaliser, de financer et de dé-risquer des modèles d’affaires en matière d’économie circulaire, au-delà de la gestion des déchets. Il soutiendra l’Acea (une alliance de plusieurs Etats d’Afrique notamment l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Rwanda, Ndlr), dans l’économie circulaire dans les stratégies nationales de croissance verte ainsi que d’adaptation aux changements climatiques. « Le financement est un facteur clé pour le déploiement de solutions innovantes, il est donc essentiel pour la BAD d’ancrer et de cultiver l’économie circulaire pour en faire un modèle économique bancable pour l’Afrique », a affirmé récemment Al-Hamndou Dorsouma, le responsable par intérim du département Changement climatique et croissance verte de la BAD.
Globalement, l’économie circulaire désigne un modèle de production et de consommation qui vise à découpler la croissance économique de la consommation des ressources. L’économie circulaire intègre notamment une meilleure gestion des systèmes alimentaires, de l’industrie d’emballage, de l’environnement bâti ainsi que de l’industrie de la mode et du textile que le rapport d’étude « Cinq grands paris pour l’économie circulaire en Afrique » a identifié en avril 2021 comme étant les plus prometteurs en Afrique
Cela implique notamment de concevoir des produits qui soient utilisables plus longtemps et faciles à réparer, réutiliser ou à remettre et maintenir dans un circuit économique. L’adoption de l’économie circulaire pourrait permettre à l’Afrique d’améliorer la gestion de ses déchets. Selon le Programme des Nations unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), 90 % des déchets produits en Afrique se retrouvent dans les décharges non contrôlées, une véritable source de pollution de l’atmosphère, des sols, des nappes phréatiques et des océans. C’est également une perte économique puisque « les déchets sont des ressources » d’après l’un des principes de l’économie circulaire.
Le pari de la valorisation des déchets électroniques
Ces déchets peuvent être valorisés à travers le recyclage ou la réutilisation. Ces dernières années, plusieurs pays africains ont progressé dans l’adoption de l’économie circulaire des déchets. C’est le cas notamment du Ghana qui mène une politique visant à transformer ses déchets en opportunités, avec le soutien du secteur privé. Ce pays d’Afrique de l’Ouest vient d’ailleurs de mettre en service un centre de recyclage des déchets électroniques.
L’installation construite sur un site d’un hectare dans la capitale Accra prendra en charge différents types de déchets électroniques, notamment les câbles, les batteries mixtes, les thermoplastiques et les téléviseurs à tube cathodique. Cette usine permettra au Ghana de réduire la quantité de déchets électriques mis en décharge. Selon les autorités, le Ghana produit en moyenne 170 000 tonnes de déchets électroniques par an, dont un quart finissent à la décharge d’Agbogbloshie dans la banlieue d’Accra.
L’appui de la technologie
La prolifération des déchets électroniques est surtout due à l’importation de vieux appareils électroniques en provenance de pays développés. Au Nigeria par exemple, 60 000 tonnes métriques d’appareils électroniques et d’équipements électriques usagés sont importées d’autres pays chaque année. Pourtant, plus de 25 % de ces appareils électroniques sont classés comme « morts à l’arrivée ».
En adoptant l’économie circulaire, le Nigeria pourrait également améliorer la gestion de ses déchets plastiques. Dans ce pays peuplé de plus de 211 millions d’habitants, des start-ups mettent sur pieds des solutions numériques pour accélérer le recyclage. C’est le cas notamment de Pakam Technology qui a lancé l’application mobile « Pakam » à Lagos. En Égypte, l’application « E-Tadweer » est opérationnelle depuis quelques mois. Cette solution numérique facilite la collecte et le recyclage des déchets électroniques. Le pays des pharaons génère 90 000 tonnes de déchets électroniques par an, dont 23 % issus des ménages, 19 % du secteur public et 58 % du secteur privé selon les chiffres officiels. Autant de solutions qui devraient s’accompagner de cadres juridiques indispensables à l’adoption et au développement de l’économie circulaire en Afrique. Ces questions seront a d’ailleurs à l’ordre du jour au WCEF2022 qui se tient du 6 au 8 décembre prochain à Kigali au Rwanda.
Jean Marie Takouleu