Le Gabon verra ses créances s’alléger de 450 millions de dollars, grâce au mécanisme novateur dette-nature. Piloté pour le compte du Gabon par Bank of America (BofA), le mécanisme dette-nature permet aux pays en développement de diminuer leur dette extérieure en contrepartie d’un financement de leur biodiversité. La contrepartie du Gabon consiste à protéger une partie de son écosystème marin. C’est le deuxième cas en Afrique après les Seychelles.
Après les Seychelles, le Gabon monnaie sa biodiversité à travers le mécanisme dette-nature. Cette opération, dont les appels d’offres ont été lancés sur la London Stock Exchange le 25 juillet 2023, permettra au Gabon de réduire à hauteur de 450 millions de dollars (soit 267,1 milliards de francs CFA) sa dette extérieure. En contrepartie, le pays s’engage à protéger son milieu marin, avec l’appui de l’organisation non gouvernementale (ONG) The Nature Conservancy, basée aux États-Unis d’Amérique.
Sur le plan financier, l’opération est conduite par Bank of America (BofA), la deuxième plus grande banque américaine en termes de dépôt.
Un échange dette-nature est une technique d’allègement de la dette des pays en développement. Elle passe par l’allongement des délais de paiement, la diminution des taux d’intérêt, l’octroi de nouveaux crédits à des taux bas et l’annulation de créances. Cette technique, inventée par le biologiste américain Thomas Lovejoy, considéré comme le parrain de la biodiversité, consiste à échanger une partie de la dette extérieure contre des investissements locaux dans des mesures de protection de l’environnement.
Le plus grand réseau de réserves marines d’Afrique
Dans le cadre de l’opération dette-nature du Gabon, le choix de protéger la biodiversité marine n’est pas anodin. Le pays d’Afrique centrale a bâti au fil des ans, le plus grand réseau de réserves marines, riches et diversifiées d’Afrique. S’étendant sur 53 000 km2, soit 26 % des eaux territoriales du pays, ce milieu comporte 20 parcs marins et réserves aquatiques. Il abrite d’innombrables espèces marines menacées, parmi lesquelles les populations reproductrices les plus importantes de tortues luths et de tortues olivâtres, ainsi que 20 espèces de dauphins et de baleines.
Le Gabon devient ainsi le deuxième pays africain, après les Seychelles, à bénéficier de l’échange dette-nature. Un échange qui devrait se rependre en Afrique, « premièrement, parce sur le continent il y a beaucoup de pays qui ont un montant très important de dettes obligataires, et qui ont des problèmes de refinancement de ces dettes. D’ailleurs d’ici à 2025, il va y avoir un mur de refinancement de la dette en Afrique subsaharienne, et comme vous le savez, la dernière fois qu’un souverain africain a émis de la dette obligataire, remonte à 18 mois. Il y a donc un problème de manque de ressources, pour aider les souverains africains, à refinancer les dettes obligataires qu’ils ont émis entre 2010 et 2020. Et c’est en cela que le Swap “dette contre nature” peut être intéressant pour les pays africains. », explique Hamouda Chekir, membre de l’équipe Conseil aux gouvernements de la banque Lazard.
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La banque française vient d’assister l’Équateur dans le cadre d’un montage financier bénéfique à la fois pour la nature et l’économie du pays. Concrètement, l’Équateur a échangé sa dette actuelle de 1,63 milliard de dollars contre une dette de 656 millions dollars, une transaction qui correspond à 3 % de la dette extérieure totale du pays d’Amérique du Sud, soit 48,129 milliards de dollars en février 2023.
Boris Ngounou