À une heure et quarante-cinq minutes de route d’Accra, la capitale du Ghana se trouve la chaîne montagneuse d’Atewa. Les populations locales l’appellent Atiwa-Atwaredu. Il s’agit d’une chaîne de montages reconnaissables par sa verdure et surtout sa canopée. Elle constitue une réserve forestière, la plus importante du Ghana. Sur les flancs de certaines montagnes de la chaîne d’Atewa, on peut observer des chutes d’eau et des rivières qui alimentent cette biodiversité exceptionnelle.
En avançant dans la jungle, l’espace naturel foisonne de biodiversité. On y trouve des espèces rares, voire endémiques de la région. C’est le cas de katydidés, une espèce de sauterelle appartenant à la famille des tettigoniidae. Huit nouvelles espèces de katydidés ont été découvertes lors d’une étude de l’organisation non gouvernementale (ONG) Conservation International en 2006. La particularité de ces espèces de katydidés est que les spécimens ont « des antennes incroyablement longues et parfois adaptées pour ressembler à une feuille ». Une sorte de camouflage pour échapper aux prédateurs.
Une biodiversité exceptionnelle
Selon l’ONG Global Wildlife Conservation, la forêt compte 3 000 espèces de plantes et plus de 570 espèces de papillons, ce qui représente 77 % du nombre total des espèces de papillons du Ghana. On y trouve également six espèces de primates, et dix espèces de grands mammifères. Mais la survie de cette biodiversité est plus que jamais menacée. À cause de la coupe d’arbre illégale et de l’orpaillage clandestin qui a lieu dans cette forêt. Et également, à cause d’un gisement de bauxite découvert dans la réserve, et que le gouvernement du Ghana est bien déterminé à l’exploiter.
La bauxite est comme du pain béni pour l’économie ghanéenne en pleine croissance. Mais son exploitation au sein d’une réserve forestière classée est tout, sauf une bonne nouvelle pour les écologistes qui protestent contre le choix du gouvernement de raser les arbres pour exploiter le sous-sol de la réserve. Ils sont rejoints dans leur combat par les populations, qui ont d’ailleurs organisé une manifestation pacifique dans la capitale ghanéenne Accra. Outre la destruction de l’écosystème unique de la forêt d’Atewa, elles craignent la pollution des eaux par la bauxite et surtout les produits chimiques qui servent à extraire ce minerai.
Atewa abrite la source de trois grandes rivières, qui approvisionnent en eau 5 millions de personnes au Ghana. Il s’agit d’Ayensu et Densu qui coulent vers le sud pour se déverser dans l’Atlantique, et la Birim qui fait un long détour au nord et au sud-ouest autour de la chaîne d’Atewa avant de rejoindre la rivière Pra.
La version du gouvernement
Des pétitions ont également été lancées en ligne pour protester contre le projet du gouvernement. La bauxite de la forêt d’Atewa sera exploitée en partenariat avec la Chine. Face aux craintes soulevées par les ONG et les populations, le Président du Ghana, Nana Akufo-Addo, a affirmé que la bauxite serait exploitée avec de nouvelles technologies pour limiter les impacts sur l’environnement. La réserve forestière d’Atewa résistera-t-elle face à la demande importante de la bauxite, notamment dans l’industrie des cannettes de boisson sur le continent africain et en Chine ? Rien n’est moins sûr… En attendant, le gouvernement a déjà commencé à raser la forêt d’Atewa en vue de la construction des routes d’accès au site de la future mine de bauxite.
Jean Marie Takouleu