Des journalistes et paysans maliens ont reçu une formation sur la culture bio et écologique le 24 septembre 2018 à l’Institut polytechnique rural de formation et de recherche appliquée (IPR/IFRA) de Katibougou au Mali. Le but de la formation était de les doter d’outils nécessaires pour pouvoir relayer des informations plus écologiques dans leurs médias respectifs et autour d’eux et par ricochet sensibiliser les publics sur les questions environnementales.
À l’heure où la pollution de l’environnement fait des ravages sur le continent africain, des mesures sont prises sur le terrain pour éviter le pire. Afin d’apporter sa pierre à la construction de l’édifice, l’Institut polytechnique rural de formation et de recherche appliquée (IPR/IFRA) en collaboration avec l’Association des organisations professionnelles paysannes (AOPP) a formé des journalistes et des paysans maliens sur la culture bio et écologique. La session de formation s’est déroulée le 24 septembre 2018 au siège de l’institut à Katibougou (ville de Koulikoro, la deuxième région administrative du Mali). L’objectif était sensibiliser les hommes et femmes de médias, de même que les producteurs et vulgarisateurs locaux sur l’importance de la culture bio et écologique. Cette formation semblait importante et urgente à l’heure où les Maliens se tournent de plus en plus vers les engrais chimiques et autres méthodes peu écologiques pour la culture du sol. La consommation totale d’engrais a augmenté, en moyenne, de 21 % entre 2008 et 2013 au Mali. En 2015, le Mali importait 339 547 tonnes d’engrais, dont près de 330 mille tonnes destinées à un usage agricole. La même année, la consommation apparente totale d’engrais chimique s’élevait à 300 474 tonnes, dont 44 % d’urée. Une pratique qui n’est pas sans incidence sur la santé des populations.
Dans son exposé, le Pr Amadou Coulibally, expert en Entomologie agricole a présenté les méfaits des engrais chimiques, en insistant sur les maladies qu’ils causent. Il a également saisi l’opportunité pour présenter aux participants des options alternatives à l’usage des engrais. Pour lui, l’agrobiologie est une alternative acceptable, car elle permet de rester productif tout en conservant les ressources naturelles. Pour rentrer plus concrètement dans le vif du sujet, les participants ont effectué une visite de terrain pour voir de près une plantation bio.
L’engrais chimique : un couteau à double tranchant
Les engrais sont des produits toxiques. Ils sont cancérigènes, tératogènes (affectent les ovules, les spermatozoïdes ou les embryons, conduisant ainsi à des malformations congénitales) et/ou mutagènes (provoquant des mutations au niveau des gènes qui peuvent affecter le système congénital). Les engrais peuvent au regard de ces caractéristiques être à l’origine de cancers, de malformations congénitales, de naissances prématurées, de maladies respiratoires… Par ailleurs, ils contribuent à la dégradation des sols. Dans un ouvrage intitulé 5 000 jours pour sauver la planète, Edward Goldsmith et d’autres chercheurs font le constat suivant : « Dès qu’un cultivateur cesse de mettre du fumier et d’autres matières organiques sur son terrain, et les remplace par les divers engrais artificiels, la structure du sol commence à se détériorer. Pour compenser la fertilité naturelle du sol, les cultivateurs sont obligés d’y mettre encore davantage d’engrais. Ce qui perpétue une dégradation croissante, laquelle aboutit finalement à la ruine du terrain ». L’usage des engrais prive le sol des éléments nourrissants et naturels, tout en détruisant aussi la vie organique qui contribue à fertiliser le sol. La potasse par exemple contenue dans les engrais appauvrit les fruits et légumes, car elle réduit leur teneur en magnésium, vitamines et les oligo-éléments. Le phosphate est dangereux pour les cours d’eau. Pourtant en cas d’utilisation, il est entrainé par les eaux de pluie vers des cours d’eau. Les engrais ont aussi une teneur en azote ; or l’excès d’azote produit des résidus sous forme de nitrate. Cette substance pollue les eaux souterraines et est très toxique pour les plantes. Des faits qui montrent la nécessité de réduire drastiquement l’usage des engrais.
L’AOPP a vu le jour en 1993, sous l’impulsion du gouvernement malien. Elle rassemble près de 130 organisations paysannes implantées dans 7 régions au Mali, une stratégie qui lui permet ses objectifs grâce à une sensibilisation de proximité. L’un de ses principaux objectifs est d’arrêter la consommation d’engrais au Mali. L’alternative qu’elle présente aux populations est l’utilisation des engrais organiques, de la fumure végétale ou animale.
Luchelle Feukeng