Benoit-Ivan Wansi : Comment se porte le secteur de l’écoconstruction au Maroc ?
Mouatassim Charai : Le Maroc est en plein dans une politique d’écoconstruction. C’est à ce titre que le ministère marocain de l’Industrie et du Commerce a lancé un appel d’offres national sur les matériaux de construction destiné aux centres de recherche. Actuellement, nous travaillons sur le développement de nouveaux matériaux non seulement pour la recherche, mais également pour permettre une collaboration étroite avec les industriels qui pourront mettre ces produits sur le marché local de la construction.
Le royaume chérifien via l’Institut de recherche sur l’énergie solaire et les nouvelles énergies (Iresen) s’est doté d’un Parc de bâtiments verts et intelligents (GSBP) situé dans la ville de Ben Guerir. Pouvez-vous revenir sur la compétition du Solar Décathlon Africa de 2019 qui a renforcé son utilité ?
Le GSBP est reparti sur quatre zones. D’abord un espace pour les laboratoires et la salle de conférences. Ensuite, deux sites qui abritent les maisonnettes construites il y a quatre ans maintenant dans le cadre du Solar Décathlon Africa (un challenge entre jeunes architectes soutenu par le gouvernement américain, Ndlr). C’est l’École nationale d’architecture (ENA) de Marrakech qui a remporté le premier prix grâce à son bâtiment construit avec des briques de terres comprimées (BTC) tandis que le chef-d’œuvre de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar au Sénégal a terminé à la deuxième place avec son édifice alimenté à l’énergie solaire.
Y a-t-il parmi ces bâtiments ceux qui ont obtenu le label « Edge » de la Société financière internationale (SFI) du groupe de la Banque mondiale, pour ne citer que cette certification ?
Quelques bâtiments ont déjà été labellisés. D’ailleurs, nous avons des équipes qui s’occupent de la certification, de l’étude de conformité des équipements et des matériaux de construction commercialisés. Nous misons donc sur l’utilisation des matériaux recyclés pour avoir des bâtiments éco-efficaces et certifiés.
Qu’entend-on par matériaux écologiques ?
Lorsqu’on parle de matériaux écologiques, on fait allusion aux matériaux améliorés qui intègrent de nouveaux ingrédients. Parmi ces ingrédients on a les déchets qui sont utilisés comme matière première et sont moins coûteux, et permettent d’améliorer les propriétés techniques de la construction telles que l’isolation thermique, l’isolation acoustique, etc. On peut également utiliser les déchets pour la régulation de l’humidité.
Pouvez-vous nous expliquer l’utilité de ces types de matériaux dans les procédés de construction d’une maison ?
On peut évidemment utiliser des éléments conventionnels tels que la terre, le ciment. D’un autre côté, il y a la possibilité de recourir aux déchets comme remplaçants partiels des matériaux de base ou alors de les utiliser comme un matériau central. Le phosphogypse par exemple est un déchet minier utilisé pour la production d’engrais de phosphates, mais qui peut servir également à la fabrication des plaques de plâtre (pour la finition des murs et des plafonds intérieurs, Ndlr).
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Cela revient plus cher de construire écologique par rapport à la méthode classique ?
En principe, c’est moins coûteux. Mais tout dépend de la technique utilisée. Tenez par exemple, si on utilise des déchets inertes, non toxiques pour pouvoir remplacer le ciment traditionnel, le prix sera moins important. À l’inverse, ce sera plus cher si on utilise des matériaux qui sont toxiques puisqu’il va falloir procéder à une phase de purification. La purification n’est pas toujours abordable donc, il est très important de développer constamment des techniques qui permettent de recycler ce type de matériaux radioactifs.
Propos recueillis par Benoit-Ivan Wansi, de retour du Maroc