Depuis le 5 janvier 2024, le Niger exploite, produit et distribue lui-même son eau potable à travers la Nigérienne des Eaux. Cette décision du gouvernement nigérien, qui est une concrétisation de sa volonté d’être plus autonome en matière de gestion de l’eau potable, traduit son intention de ne pas renouveler le contrat d’affermage de la Société d’exploitation des eaux du Niger (SEEN). La filiale du géant français de l’environnement Veolia, qui a géré ce secteur dans le pays d’Afrique de l’Ouest pendant plus de 22 ans.
Pour mémoire, la Société nationale des eaux (SNE), ancêtre de la SEEN, née de la scission de la Nigérienne de l’électricité (Nigelec) a été créée en 2001. La SNE a ainsi été cédée à des actionnaires dont Veolia qui est devenue l’actionnaire majoritaire avec 51% des parts. Les 49 % restants sont détenus par des entreprises privées nigériennes (39%), le personnel de la SEEN (10%) et l’État du Niger (5%).
Concrètement, la nouvelle Nigérienne des Eaux, dont le projet de décret portant création a été adopté le 12 janvier 2023, assure aujourd’hui la continuité du service public de l’eau en milieu urbain au Niger. « Afin de définir les modalités et faciliter le transfert de l’exploitation au nouveau fermier, un protocole a été signé entre l’État du Niger et la SEEN en mars 2023. Dans ce protocole, il est prévu entre autres, la reprise du personnel du fermier sortant par la Nigérienne des Eaux, étant donné que l’essentiel du personnel est nigérien ayant toutes les compétences requises », a expliqué le ministre nigérien de l’Hydraulique et de l’Environnement, Maïzama Abdoulaye. Par ailleurs, l’autorité a indiqué que cette nationalisation de la gestion de l’eau potable marque le début d’une nouvelle ère au Niger, le gouvernement jouant un rôle plus direct dans la gestion de cette ressource essentielle.
Œuvrer à l’atteinte de l’ODD6 d’ici à 2030
La Nigérienne des Eaux, prend ainsi les rênes du secteur de l’eau alors que le pays est en plein dans une crise politique qui a conduit le 26 juillet 2023 à l’éviction du pouvoir du président Mohamed Bazoum, par les putschistes que dirige le général Abdourahmane Tchiani. Celui-ci a été proclamé chef de l’État le 28 juillet de la même année, après être parvenu à rallier à sa cause le reste de l’armée nigérienne. Et moins de trois mois plus tard (le 10 octobre 2023), environ 1 400 militaires français quittaient Ouallam, ville située à l’ouest du Niger, sous escorte nigérienne, en direction de N’Djamena au Tchad.
Aussi, la question qui se dégage est celle de savoir si le départ du français Veolia s’inscrit il dans la continuité du départ des troupes françaises du Niger ? Rien n’est moins sure. Par contre ce qui est sûr et concret est la mission de la Nigérienne des Eaux, celle d’améliorer l’accès à l’eau potable des Nigériens, estimé à moins de 50 % actuellement. L’ambition du gouvernement nigérien est la couverture universelle à l’horizon 2030.
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Pour soutenir cette ambition justement, le pays situé au cœur du Sahel met en œuvre plusieurs projets, dont le projet de 45 adductions d’eau potable (AEP) en cours dans les régions de Dosso, Maradi, Tahoua et Tillabéri depuis décembre 2022. Ou encore, le Programme sectoriel eau, hygiène et assainissement (Proseha) qui devrait s’achever en 2024. Le Proseha comprend cinq sous-programmes dédiés à l’approvisionnement en eau potable, l’hygiène et l’assainissement, le suivi et la protection des ressources en eau, la gouvernance et l’hydraulique pastorale. Ces sous-programmes seront exécutés en trois phases successives.
Inès Magoum