C’était une condition sine qua non au financement chinois du projet hydroélectrique de Mambilla. Désormais, c’est chose faite ! Le gouvernement fédéral du Nigeria vient de faire une demande officielle de prêt auprès d’Exim Bank of China pour financer les entreprises chinoises qui réaliseront le projet dans l’État de Taraba, à l’est du pays.
Conformément à l’accord conclu entre les autorités nigérianes et chinoises, Exim Bank of China financera la mise en œuvre du projet à hauteur de 4,93 milliards de dollars, soit 85 %. L’État nigérian apportera 870 millions de dollars, soit 15 %. « Les 85 % qui seront fournis par l’Exim Bank of China correspondent au prêt demandé par le gouvernement fédéral. Il s’agit d’une demande officielle, mais cela ne signifie pas que l’Exim Bank remettra l’argent au gouvernement fédéral. L’argent sera versé directement aux entreprises chinoises qui mettent en œuvre le projet, au nom du gouvernement fédéral », explique un haut fonctionnaire du ministère nigérian de l’Énergie à nos confrères de This Day.
Un projet mis en œuvre par Sinohydro et CCECC
Le barrage de Mambilla devrait fournir 3,05 GW d’électricité et sera élevé au niveau du village de Gembu, sur le fleuve Dongo. Problème : cette énorme infrastructure devrait entraîner le déplacement de 100 000 personnes dans l’État de Tabara, ce qui a poussé plusieurs partenaires au développement à se montrer réticents à financer ce projet. Finalement, c’est Exim Bank of China qui accompagne l’État nigérian, en le finançant à 85 %. Comme il est souvent d’usage avec les financements chinois, le projet a été confié en 2013 à l’entreprise Sinohydro, spécialisée dans la construction des barrages.
Autre classique de la politique de financement chinoise en Afrique, la China Development Bank, travaille au côté de l’Agence française de développement (AFD) et de la Kreditanstalt für Wiederafbau (KFW), l’agence allemande, et de 20 autres banques de développement réparties dans le monde au sein de l’International development finance club (IDFC) pour harmoniser les pratiques dans le cadre des accords de Paris sur le climat et du respect des ODD (Objectifs du développement durable). Mais, dès qu’il s’agit de passer outre ces contraintes et de financer des projets sous condition d’attribution aux entreprises chinoises, c’est Exim Bank of China qui intervient…
L’État du Nigeria avait d’abord retiré le projet à Sinohydro. Raison invoquée, le retard pris dans l’attribution du marché et dans la réalisation des études de faisabilité. Les négociations entre les deux partenaires n’ont pas débouché sur une solution de reprise. Finalement, c’est une rencontre entre le président nigérian Muhammadu Buhari et son homologue chinois Xi Jinping en 2017 qui va permettre de débloquer la situation. La construction du barrage hydroélectrique de Mambilla est à nouveau confiée à Sinohydro. Mais cette dernière devra travailler avec China Civil Engineering Construction Corporation (CCECC).
Sinohydro et CCECC devront détourner une partie des eaux du réservoir du barrage Mimballa, en place depuis 1982. L’eau sera conduite par trois tunnels de 33 km chacun. Une partie de l’eau, qui arrive avec une très forte pression, sera interceptée par les barrages de Sum Sum et de Nghu. L’autre partie des eaux du barrage de Mambilla alimentera les deux centrales souterraines construites dans la roche. Le plus gros barrage affichera une hauteur de 150 m.
Jean Marie Takouleu