Le Nigéria, premier producteur africain de pétrole, n’entend pas supprimer les subventions sur le prix du pétrole comme le lui conseillaient pourtant la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI). Face à la presse, le 17 avril 2019, la ministre nigériane des Finances a été claire à ce sujet : « nous devons trouver une formule qui fonctionnera pour le Nigeria. Et jusqu’à ce que nous fassions cela, nous ne devrions pas envisager de supprimer la subvention », a déclaré Zainab Ahmed aux journalistes.
Lors de leurs dernières réunions de printemps, qui se sont tenues du 8 au 14 avril 2019 à Washington (aux États-Unis), les deux institutions de Bretton Woods avaient pourtant proposé au Nigéria d’abroger la subvention à l’essence.
Cette proposition est principalement fondée sur un argument écologique. La Banque mondiale et le FMI sont convaincus que les subventions aux combustibles encouragent l’utilisation effrénée de combustibles fossiles, qui polluent localement l’atmosphère et génèrent un excès de dioxyde de carbone dans l’air, l’un des principaux gaz à effet de serre, qui contribue au réchauffement climatique. Le phénomène est à l’origine de la hausse de la température sur la planète, qui est à son tour responsable des inondations catastrophiques faisant des milliers de victimes dans de nombreuses régions du monde.
Annulation de la subvention du carburant : la crainte d’Abuja
La Nigerian National Petroleum Corporation (NNPC), l’agence publique en charge la gestion du pétrole au Nigéria, a indiqué en mars 2018 dans un communiqué, qu’elle alloue environ 94,32 millions de dollars chaque année pour subventionner le carburant. Cette subvention permet au Nigerians de profiter d’un prix du carburant, qui se situe au sixième rang le plus bas au monde, après l’Algérie, le Koweït, l’Iran, le Soudan et le Venezuela. Il s’établit 0,4 dollar le litre, alors que le prix moyen de l’essence dans le monde est de 1,14 dollar le litre.
Représentant un peu plus de cinq pour cent les recettes de l’État en 2018, ces subventions peuvent selon la Banque mondiale et le FMI, être injectées plutôt dans des secteurs où le Nigéria peine à tenir son rang, telles l’éducation et la santé.
Un retrait de la subvention à l’essence au Nigéria pourrait cependant être préjudiciable à la stabilité de ce pays d’Afrique de l’Ouest, où le prix de l’essence est aussi inflammable que le carburant lui-même. Une augmentation du prix officiel de l’essence à la pompe pourrait faire grimper le taux d’inflation de plusieurs crans. Cela déclencherait sans doute des émeutes de rue sans précédent que personne ne pourrait contrôler. C’était déjà le cas janvier 2012. L’ancien président Goodluck Jonathan avait mis le pays en ébullition à la suite d’une hausse du prix du carburant. Situation similaire en mai 2016. Et, cette augmentation du litre du carburant de 0,30 dollar à 0,73 dollar, qui n’avait duré qu’un mois, avait selon la NNPC, réduit de 30 % la consommation nationale du carburant…
Boris Ngounou