Théâtre d’une exploitation intensive de pétrole, qui dure depuis une cinquantaine d’années, plusieurs villes et villages de l’État de Bayelsa au sud du Nigeria sont actuellement ravagés par une marée noire et une pollution de gaz. Dans un rapport publié le 16 mai 2023, le gouvernement local alerte sur « une catastrophe humaine et environnementale dévastatrice ».
Fruit d’un travail de recherche de plus de quatre ans menée par une commission mise en place par le gouvernement local, et constituée d’un panel international d’experts, le rapport souligne que « la région, qui abritait autrefois l’une des plus grandes forêts de mangroves de la planète (…) est aujourd’hui l’un des endroits les plus pollués au monde ». Les polluants toxiques provenant des déversements et du torchage de gaz sont plusieurs fois supérieurs aux limites de sécurité dans des échantillons de sol, d’eau, d’air et dans le sang des près de deux millions de résidents locaux. Quelque 1 600 résultats de tests sanguins réalisés sur la population locale montrent notamment des contaminations hautement toxiques, des cas de brûlures, de problèmes pulmonaires et de risques de cancer.
Shell et Eni, pointées du doigt
Selon la commission en charge de l’enquête, au moins 11 milliards d’euros sont nécessaires pour dépolluer les sols, l’eau potable, réduire les risques sanitaires pour les populations et restaurer les forêts de mangroves. Une facture qui devrait en partie être payée par les compagnies pétrolières, l’anglaise Shell et l’italienne Eni, qui ont exploité le pétrole de Bayelsa durant des décennies, et dont des filiales locales continuent d’opérer dans la région.
Contacté par l’Agence France Presse (AFP), un porte-parole de Shell Petroleum Development Company of Nigeria a déclaré qu’il n’était pas au courant du rapport sur la pollution pétrolière à Bayelsa et ne pouvait par conséquence pas le commenter.
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Du côté d’Eni les responsables locaux font savoir que les marées noires sont dues à des cas de vols, pour alimenter des raffineries illégales ainsi qu’à des exportations illégales et à des sabotages. Cependant la société s’est engagée à remédier à tous les déversements.
Boris Ngounou