La Banque africaine de développement (BAD) vient de démentir les allégations d’une centaine d’organisations de la société civile sur ses engagements supposés envers un projet d’énergie fossile en Ouganda. L’institution financière panafricaine déclare qu’elle ne financera pas le pipeline de pétrole brut d’Afrique de l’Est (Eacop), car il ne relève pas de son domaine d’intervention prioritaire, à savoir les énergies renouvelables.
La Banque africaine de développement (BAD) ne prévoit aucun soutien financier au projet d’oléoduc de pétrole brut entre l’Ouganda et la Tanzanie. « La BAD réfute catégoriquement les allégations de soutien financier à un projet d’oléoduc en Afrique de l’Est. Le Fonds de préparation des projets d’infrastructures (IPPF) du NEPAD n’a fourni de financement à aucune société du secteur privé pour des projets d’oléoduc ou de gazoduc en Afrique de l’Est » a indiqué l’institution financière le 20 avril 2020.
En mars 2020, plus d’une centaine d’organisations de la société civile (OSC) et d’ONG de protection de l’environnement ont écrit une lettre conjointe adressée au président de la BAD, Akinwumi Adesina, l’appelant à rejeter une demande de l’Ouganda et de la Tanzanie, ayant pour objet le financement partiel d’un projet de pipeline conjoint. Elles s’étaient appuyées sur une demande de subvention qui aurait été faite par le biais du Fonds spécial Nepad IPPF de la BAD, qui reçoit également des contributions financières de pays comme l’Allemagne, le Canada, la Grande-Bretagne, la Norvège, le Danemark et l’Espagne.
Le projet Eacop présente des risques sociaux et environnementaux
Le projet de pipeline de pétrole brut d’Afrique de l’Est (Eacop), auquel sont associés les gouvernements ougandais et tanzanien, prévoit la construction d’un oléoduc de 1 443 kilomètres de long (dont 296 km en Ouganda) pour exporter le brut qui sera extrait du lac Albert jusqu’au port de Tanga en Tanzanie, à des fins d’exportation vers les marchés internationaux. Stanbic Ouganda et Sumitomo Mitsui du Japon sont les conseillers financiers officiels du projet et le financement par emprunt du pipeline devrait s’élever à environ 2,5 milliards de dollars. L’Eacop devrait être le plus long pipeline chauffé au monde, transportant environ 216 000 barils de pétrole brut par jour (10,9 millions de tonnes par an) à travers des districts fortement peuplés dans les deux pays.
Mais en janvier 2020, l’Africa Institute for Energy Governance (Afiego), un organisme de recherche sur les politiques publiques et la Civil Society Coalition on Oil and Gas (CSCO), une coalition de 61 organisations de la société civile travaillant sur les questions pétrolières et gazières en Ouganda, ont appelé l’Autorité nationale ougandaise de gestion de l’environnement (Nema) et les citoyens ougandais à rejeter le rapport d’impacts environnementaux et sociaux de ce pipeline, publié par le gouvernement Ougandais.
Pour ces organisations, la construction de l’Eacop engendrerait de graves dégâts environnementaux et sociaux. L’extraction du pétrole brut dans le lac Albert pourrait paralyser les activités des pêcheries. Par ailleurs, le risque de déversement de pétrole dans le lac Victoria aurait des conséquences désastreuses sur des millions de personnes (dans environ huit pays) qui dépendent des deux lacs et de leurs bassins versants pour l’eau potable et la production alimentaire.
La BAD réaffirme son engagement pour les énergies renouvelables
En réfutant les allégations sur son supposé soutien financier à l’Eacop, la BAD a réitéré son engagement envers les énergies renouvelables. Il s’agit pour la Banque de promouvoir la transition vers un développement à faible teneur en carbone et à un développement résilient au changement climatique dans les pays africains. Entre 2016 et 2019, la Banque soutient que les projets d’énergies renouvelables ont constitué en moyenne 85 % des projets qu’elle a financés dans la production d’électricité.
De plus, la BAD assure être en train de s’associer aux autres banques de développement multilatérales pour mettre en place un cadre garantissant que tous ses investissements soient en cohérence avec les objectifs de l’Accord de Paris (100 % de projets d’énergies renouvelables, et activités agricoles et infrastructures durables, à faible niveau d’émission).
Boris Ngounou