Oui pour un meilleur accès des femmes africaines à la finance verte, mais comment ?

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Oui pour un meilleur accès des femmes africaines à la finance verte, mais comment ? ©BAD

La finance verte en faveur des femmes, notamment en Afrique est-elle suffisante ? Les femmes engagées et organisations féministes et de défense de l’environnement consultées par Afrik 21 s’accordent à dire non, et donnent des pistes de solutions pour accélérer le financement durable pour impulser le changement environnemental. À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes qui se célèbre ce 8 mars 2024, nous avons compilé leurs propositions dans cet article.

Si les femmes sont plus vulnérables au changement climatique, elles disposent cependant d’idées et d’un leadership nécessaire pour lutter efficacement contre ce phénomène, qui perturbe désormais l’équilibre de l’écosystème, entre records de chaleur au sud du Sahara, fonte des glaces de l’arctique et inondations dévastatrices sur les côtes méditerranéennes.

On voit donc de plus en plus de femmes qui œuvrent en faveur du développement durable, notamment sur le continent africain qui se réchauffe plus vite que la moyenne mondiale (avec augmentation des températures de + 1,4°C depuis l’ère préindustrielle contre + 1,1°C à l’échelle du globe, Ndlr). On peut citer la chercheuse malgache Lovasoa Rina Raharinaivo dont les travaux portent sur « la pollution et ses alternatives à Madagascar », la Rwandaise Ange Cynthia Umuhire qui se consacre à « prédire et prévoir la météo spatiale au Rwanda », la jeune Iveren Abiem qui a développé le projet de « séquestration de carbone dans la forêt afromontagnarde » au Nigéria, la chercheuse Farida Boube Dobi pour son initiative sur la gestion des eaux souveraines au Niger ou encore la Togolaise Mawulolo Yomo, doctorante spécialisée en Sciences de la vie et de l’environnement qui se distingue grâce à ses travaux sur « la dynamique de l’intrusion de l’eau de mer dans le bassin sédimentaire côtier du Togo ».

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Les idées de ces scientifiques ont d’ailleurs reçu le prix « Jeunes talents Afrique subsaharienne pour les femmes et la science » de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) et la fondation L’Oréal du groupe industriel français spécialisé dans la cosmétique, en 2022. Nous pouvons également citer des dames de fer comme Arlette Soudan Nonault, la ministre congolaise de l’Environnement, du Développement durable et du Bassin du Congo et Wangari Muta Maathai, modèle pour la lutte écologique en Afrique, qui militent pour qu’on concilie atténuation et développement en Afrique.

Mais les idées seules peuvent-elles suffire sans un accompagnement financier ? Cette question sera posée lors des multiples débats organisés ce 8 mars à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes. Il sera également question de stratégies d’accélération de la finance verte en faveur des femmes, relativement au thème de cette année : « investir en faveur des femmes, accélérer le rythme ».

Comment accélérer la finance verte en faveur des femmes ?

Le Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) explique l’insuffisance de financement climatique en faveur des femmes par le fait que les besoins de financement de l’adaptation des pays en développement de manière globale sont 10 à 18 fois plus importants que les flux de financement public international. Les levées des fonds des start-up africaines ont d’ailleurs baissé de 36% en 2023 pour atteindre 3,2 milliards de dollars, contre 5 milliards en 2022 selon des données publiées le mercredi 3 janvier 2024 par le cabinet de conseil en économie numérique TechCabal Insights.

L’organisation des Nations unies préconise donc les transferts de fonds, l’augmentation et l’adaptation des financements aux petites et moyennes entreprises (PME), la mise en œuvre de l’article 2.1(c) de l’Accord de Paris sur la réorientation des flux financiers vers des voies de développement à faible émission de carbone et résilientes au changement climatique, et une réforme de l’architecture financière mondiale pour réduire le déficit de financement.

Pour la coalition mondiale « Droits et Ressources », les bailleurs de fonds doivent faire un effort conscient pour diffuser des informations sur les possibilités de financement aux femmes et aux filles ; adapter les financements en utilisant des approches ascendantes et fondées sur le contexte en vue de financements climatiques tenant compte du genre, et créer des cadres de suivi pour l’adaptation au climat, la résilience et l’atténuation éclairés par les expériences des femmes en matière d’accès à ces fonds et de leur gestion ; et assurer la représentation des femmes et dans les comités internes formés par les bailleurs de fonds pour l’affectation et le suivi des fonds engagés, entre autres.

Avec une proportion de 24% de femmes africaines entrepreneuses, elles surpassent largement leurs homologues européennes. Malgré cela, elles font face à des obstacles considérables, déplore Kadia Sylla Moison, qui souligne qu’en termes de financement, elles restent sous financées et ont très souvent un accès limité au financement en capital-risque. « Je pense qu’il est important de fournir un soutien adapté et spécifique pour permettre une intégration complète des contributions des femmes à l’économie africaine, notamment celles qui œuvrent à la lutte contre le changement climatique dont elles sont les premières victimes. Il faudrait pour cela créer des partenariats publics privés avec des entreprises de microfinance pour faciliter les accès aux crédits et encourager la formation professionnelle et l’éducation à la finance », ajoute cette entrepreneure engagée en Afrique, et directrice du groupe de conseil et de services en ressources humaines Grant Alexander.

Quelques initiatives concrètes favorisant l’accès des femmes aux capitaux

Néanmoins, de réels progrès sont à constater notamment grâce aux initiatives comme l’Initiative pour favoriser l’accès des femmes au financement en Afrique (Afawa), qui vise à combler le déficit de financement qui affecte les femmes en Afrique, estimé à 42 milliards de dollars. Afawa s’appuie sur les divers instruments financiers de la Banque africaine de développement (BAD). Ils ont octroyé en 2018 plus de 50 millions de dollars de ligne de crédit aux femmes via des institutions telles que Fidelity Bank et Kenya Commercial Bank.

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Afawa est également un investisseur d’ancrage dans Alitheia IDF Managers (AIM), le premiers fonds d’investissement privé en son genre, dirigé par des femmes gestionnaires de fonds expérimentés et qui investit dans des petites et moyennes entreprises (PME) à forte croissance détenues et dirigées par des femmes en Afrique. AIM qui cible dix pays d’Afrique australe et de l’Ouest, entend mobiliser 100 millions de dollars.

« On peut aussi citer l’engagement des entreprises de la micro finance comme le groupe privé de services financiers Finadev ou le groupe Akiba Finance en Guinée dans l’accompagnement des femmes et le financement dans les différentes activités génératrices de revenus », renchérit Kadia Sylla Moison, qui est également présidente fondatrice de l’association Audacity for Africa qui œuvre pour la formation professionnelle des jeunes et notamment des femmes africaines dans des projets entrepreneuriaux.

Inès Magoum

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