Une commission du parlement centrafricain vient de rendre publics les résultats de son enquête sur l’activité minière dans la zone de Bozoum, une ville située au nord du pays. Il en ressort que les entreprises chinoises Tian Roun, Tian Xiang, SMC Mao et Meng sont responsables de graves abus liés à l’exploitation de mines d’or. Le rapport évoque un désastre écologique.
Une commission d’enquête parlementaire en Centrafrique recommande l’arrêt de l’exploitation de mines d’or par quatre sociétés chinoises à Bozoum, dans le nord du pays. Cette recommandation est contenue dans un rapport rendu public samedi 13 juillet 2019 à Bangui, la capitale. Le rapport intitulé « Désastre écologique » souligne la gravité des activités menées par les sociétés Tian Roun, Tian Xiang, SMC Mao et Meng.
À la suite de plusieurs plaintes formulées par les populations, la commission d’enquête conduite par le député Bernard Dillah s’est rendue à Bozoum du 6 au 10 juin 2019. Sur place, les députés ont constaté une pollution de l’eau du fleuve Ouham, dévié de son lit par les sociétés minières, ainsi que la disparition des espèces aquatiques. « On ne peut plus reconnaitre le fleuve Ouham. Ce cours d’eau servait pour la pêche, pour boire, pour se laver… Aujourd’hui, l’eau est totalement polluée. Nous avons rencontré le chef d’un poste de santé qui nous a dit que depuis un peu plus de deux mois, les cas d’avortements ont été multipliés par dix parce que les femmes utilisaient cette eau » a déclaré Bernard Dillah.
Par ailleurs, la commission d’enquête soupçonne des irrégularités dans les comptes présentés aux autorités par les sociétés minières. « Le mode d’exploitation utilisé s’apparente à un bradage de nos ressources, avec la complicité de certains responsables du ministère des Mines », accuse le rapport.
Un rapport pour rien ?
Le rapport des députés centrafricains n’est pas le premier à dénoncer les abus commis par les compagnies minières chinoises dans le pays situé au cœur de l’Afrique. Depuis 2016, des rapports sur de nombreuses compagnies minières exploitant dangereusement l’or en Centrafrique se succèdent sans que rien ne change véritablement sur le terrain.
En juillet 2018, une enquête interministérielle a infligé des amendes à une entreprise chinoise, présente dans la région de Yakolé, qui exploitait l’or sans permis. Et en 2017, c’est l’ONU qui épinglait une coopérative minière, pour avoir financé des rebelles anti-Balaka hostiles à leurs compatriotes musulmans.
En République centrafricaine comme dans bien d’autres États africains, l’activité minière illustre parfaitement le dicton de la « malédiction des ressources ». Outre que l’activité ne profite pas aux populations locales, l’exploitation minière détruit la nature et la santé humaine.
Dans une enquête sur la pollution à Lubumbashi menée avec des experts belges en 2012, le toxicologue congolais Célestin Banza avait révélé des concentrations de cobalt, de cuivre, de plomb, voire d’uranium dans les urines, en particulier celles des enfants. Des concentrations qui dépassent largement les valeurs de référence admises par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS)…
Boris Ngounou