La Tanzanie a récemment délivré trois nouveaux permis de chasse à l'éléphant, une décision qui suscite une vive inquiétude au Kenya, en particulier pour les rares « Super Tuskers », ces majestueux éléphants dotés de défenses pesant jusqu'à 45 kilogrammes.
Pendant près de trois décennies, un accord avait préservé ces « Super Tuskers » dans la région frontalière entre la Tanzanie et le Kenya. Toutefois, avec les récents incidents de chasse, cet accord semble remis en question. Joseph Ole Lenku, gouverneur du comté de Kajiado au Kenya, a exprimé sa vive préoccupation. Dans un communiqué, il fait part de « sa profonde inquiétude » et les nouveaux permis de chasse délivrés ne font « qu’accentuer une anxiété autour de l’avenir de ces créatures iconiques », tance-t-il, avant d’appeler les autorités tanzaniennes à prendre en compte les conséquences de leurs décisions.
Les chiffres sont alarmants. Cynthia Moss, fondatrice du fonds d’Amboseli pour les éléphants, révèle qu’il ne reste qu’une dizaine de « Super Tuskers » dans la zone frontalière entre le Kenya et la Tanzanie. La Big Life Foundation, une organisation non gouvernementale (ONG) locale, confirme que les trois éléphants récemment chassés en Tanzanie étaient parmi ces rares spécimens, dont les défenses dépassent les 45 kilogrammes.
Près de 2/3 des « Super Tuskers » ont disparu en seulement 8 ans
Les conséquences de ces chasses sont dramatiques, non seulement pour la survie des « Super Tuskers », mais aussi pour la biodiversité dans son ensemble. Alors que le nombre de grands mammifères dans les zones protégées d’Afrique a chuté de 60 % entre 1970 et 2005, cette pratique de chasse à l’éléphant soulève des questions fondamentales.
Lire aussi-GABON : le gouvernement de transition réajuste sa décision sur l’abattage d’éléphants
Les chasseurs justifient leurs actions en invoquant des contributions financières à la gestion des réserves et à la préservation de l’espèce. Cependant, ces arguments ne tiennent pas toujours, comme en témoignent la corruption et le braconnage dans certaines régions, notamment en Tanzanie, où en 2016, des chasseurs étrangers ont été observés en train d’abattre des éléphants en gestation à la kalachnikov. Une situation qui a entraîné une chute drastique de la population d’éléphants dans certaines réserves, comme Selous au sud du pays, où leur nombre a été réduit de près de 2/3 en seulement huit ans.
Boris Ngounou