Les autorités tchadiennes viennent de choisir l’association Noé pour lui déléguer la gestion de la réserve de faune de Binder-Léré à l’ouest du pays. Cette délégation a notamment pour objectif de lutter contre le braconnage, principal problème de cet espace naturel.
Les éléphants de la réserve de faune de Binder-Léré auront peut-être quelques jours de plus à vivre. Une convention vient en effet d’être signée par Abdelkerim Haggar Sidick, ministre tchadien de l’Environnement, de l’Eau et de la Pêche, et Romain Beville, Chargé de mission des parcs de Noé. Il s’agit d’une association française qui œuvre pour la protection de la biodiversité dans le monde.
Les deux parties s’engagent à travailler sur la gestion de cette réserve située dans la région de Mayo-Kebbi Ouest, à la frontière avec le Cameroun.
Délégation de la gestion de la réserve : une nécessité ?
Selon l’association Noé, les autorités tchadiennes l’ont choisi pour son expérience du terrain, notamment avec « le projet transfrontalier avec le Niger, qui bénéficie d’un accord de partenariat avec APN (African Parks Networks) ». Mais avant de signer la convention entre le ministère tchadien de l’Environnement, de l’Eau et de la Pêche et l’association Noé, plusieurs missions de prospection ont été menées au sein de la réserve de faune de Binder-Léré.
La biodiversité prospère dans cet espace naturel grâce à la rivière Mayo-Kébbi qui coule d’est en ouest et les chutes Gauthiot. Mais la biodiversité de cette de zone est actuellement menacée par le braconnage. Ce phénomène concerne particulièrement les éléphants. Ces gros mammifères sont abattus pour leurs défenses d’ivoire, très recherchées sur le marché de contrebande.
D’ailleurs, la réserve a récemment fait la Une des médias tchadiens, à son détriment. Entre le 18 et le 30 janvier 2018, ce sont en tout 19 carcasses d’éléphants qui ont été retrouvées dans la réserve de faune de Binder-Léré. Pourtant, l’espace naturel compte moins de 120 éléphants. Selon les autorités tchadiennes, les auteurs de ces crimes, localement connus sous le pseudonyme de « cavaliers », sont venus du Soudan. Ces hommes lourdement armés seraient passés par le nord-est de la République centrafricaine (RCA), maîtrisant les corridors de migration des éléphants dans ce vaste écosystème de savane.
Une once d’espoir ?
Le massacre des éléphants d’Afrique centrale ne date pas d’aujourd’hui. Il s’agit d’un phénomène qui s’est généralisé dans les différents parcs nationaux et les réserves de la région. Dans le parc national de Zakouma à l’est du Tchad, les éléphants ont frôlé l’extinction. Les rhinocéros, dont les populations étaient moins importantes que celles des éléphants, n’ont pas survécu au braconnage dont l’objectif était de s’emparer de leurs cornes.
Mais la population d’éléphants de ce parc est en train d’augmenter avec la délégation de sa gestion à APN. Les efforts de cette association pour réintroduire les rhinocéros noirs venus d’Afrique du Sud se sont soldés par un échec. Quoi qu’il en soit, la délégation de la gestion du parc a permis la régénération d’une partie importante de la biodiversité du parc national de Zakouma. Et les touristes recommencent à prendre la direction du Tchad. On s’attend à ce que ce modèle de gestion inspire les pays voisins comme le Cameroun avec le parc national de Waza et la réserve de Bouba Ndjida, situés près de la frontière tchadienne et qui sont également frappés par le braconnage.
Jean Marie Takouleu